En amont de l’extension du Parc Industriel de la Plaine de l’Ain (PIPA) sur les communes de Saint-Vulbas et de Blyes (Ain), 21 diagnostics et 15 fouilles archéologiques ont été réalisés par les équipes de l’Inrap. Ces opérations ont notamment mis au jour un vaste site funéraire de l’âge du Bronze.

Dernière modification
14 mars 2025

Situé à 35 km à l’est de Lyon, le PIPA (Parc Industriel de la Plaine de l’Ain) est une zone d’activité de près de 1 000 hectares, implantée en rive droite du Rhône. Elle fait l’objet d’un suivi archéologique depuis 2010, mais c’est essentiellement à partir de 2015 que les opérations de diagnostic se sont succédé sur l’emprise du projet. Environ 350 hectares ont été sondés, et 15 fouilles ont été réalisées par l’Inrap sur prescription et contrôle de l’État (Drac Auvergne–Rhône-Alpes). Pour la Protohistoire comme pour le Néolithique ou la période romaine, ces opérations renouvellent de manière significative la documentation régionale. Durant la Protohistoire, le site se caractérise notamment par un vaste ensemble funéraire, fréquenté depuis le Bronze moyen (1600-1350 avant J.-C.) jusqu’à la fin du Premier âge du Fer (800-450 avant J.-C.).

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Vue aérienne des chantiers du Lot 10 phase 2 (au loin) et du Lot 7 secteur 2000 en cours de décapage (au premier plan), avec ses enclos circulaires de la fin du Bronze final.

© Inrap

Habitat du Bronze ancien (2150-1600 avant J.-C.)

Un grand bâtiment allongé sur poteaux, attribuable au Bronze ancien, a été mis au jour lors de la fouille d’une nécropole antique. Dix-sept trous de poteau dessinent le plan incomplet d’une construction longue et étroite, globalement orientée est-ouest. De 18,20 m de longueur pour une largeur comprise entre 3,20 m à l’ouest et 5,50 m à l’est, son emprise au sol peut être estimée à 80 m2. Quatre bâtiments de datation identique, découverts dans le cadre d’une fouille réalisée par un autre opérateur d’archéologie préventive, présentent un plan similaire. Tous ont la même orientation et possèdent deux nefs, des travées de 2,5 m à 3 m de largeur en moyenne ainsi qu’une structure carrée interne sur quatre poteaux.
Le plan stéréotypé des bâtiments du PIPA trouve des comparaisons sur d’autres sites régionaux.

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Grande maison sur poteaux du Bronze ancien (chantier Lot 9 sud).

© Inrap

Enclos funéraires sub-rectangulaires du Bronze moyen

Les enclos funéraires sub-rectangulaires du Bronze moyen, matérialisés par des tranchées de faible profondeur, sont attestés à une dizaine d’exemplaires sur le PIPA. Ils présentent tous les mêmes proportions, la même orientation, la même ouverture étroite au sud, et sont organisés le long d’un axe directeur nord-nord-est / sud-sud-ouest parallèle au cours du fleuve.

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Enclos funéraires subrectangulaires du Bronze moyen (chantier Lot 10 phase 1).

© Inrap

Aucune tombe n’est conservée dans leur espace central, mais leur fonction sépulcrale ne fait guère de doute, d’autant que des sépultures plus tardives s’implantent en périphérie. D’abord interprétées comme des fossés, ces tranchées correspondent plus probablement à des creusements de fondation, destinées à l’implantation d’une palissade formée de pieux quasi jointifs.

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Enclos funéraires subrectangulaires du Bronze moyen (chantier Lot 10 phase 1). 

© Inrap

Dépôts de crémation de l’étape moyenne du Bronze final (1150-950 avant J.-C.)

Une quinzaine de dépôts de crémation, datés de l’étape moyenne du Bronze final, ont été fouillés sur l’emprise du PIPA. Neuf d’entre eux forment un ensemble autonome, situé à l’écart des monuments du Bronze moyen. Implantés dans des fosses assez ajustées, différents vases-ossuaires (urnes) recueillent les restes crématisés des défunts, dont le prélèvement sur le bûcher a généralement fait l’objet d’une sélection.

Ces restes s’accompagnent d’éléments de parure ou d’habillement en alliage cuivreux, souvent très dégradés par leur exposition à la chaleur. Parmi eux, on note la présence d’objets importés, comme une épingle provenant de la Haute-Bavière (Allemagne) ou du Tyrol (Autriche), et un rasoir peut-être issu de la Plaine du Pô (Italie).

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Photographie d’une épingle en alliage cuivreux importée de Haute-Bavière ou du Tyrol (chantier Lot 9 secteur sud-ouest). 

© Inrap

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Dessin technique de l’épingle en alliage cuivreux importée de Haute-Bavière ou du Tyrol (chantier Lot 9 secteur sud-ouest). 

© Jean-Michel Treffort, Inrap

 

Inhumations de la fin du Bronze final (950-800 avant J.-C.)

Six inhumations, datées de la fin du Bronze final, ont été mises au jour à proximité des dépôts de crémation. L’une d’entre elles, recouverte par le reliquat d’un tertre de sédiment (tumulus), occupe le centre d’un petit enclos fossoyé circulaire. Un groupe de quatre inhumations a été fouillé non loin de là, évoquant un petit ensemble (familial ?) implanté en périphérie d’une tombe fondatrice. Une sépulture double, contenant le corps de deux enfants, a également été découverte à l’écart de ce groupe.

Enclos de la fin du Bronze final

Près du rebord de la terrasse alluviale, au-dessus de la basse plaine du Rhône, une quinzaine de grands enclos funéraires circulaires ont également été fouillés. Les sépultures qui en occupaient le centre, sans doute initialement recouvertes par des tumulus, ne sont pas conservées. Cependant, leur rattachement à l’étape finale du Bronze final peut être proposé par hypothèse, sur la base du mobilier céramique présents dans le comblement des fossés.

 

Structures de combustion à pierres chauffées de la fin du Bronze final

Un certain nombre de structures de combustion à pierres chauffées en fosse rectangulaire ont été fouillées sur l’emprise du projet. Datées de la fin du Bronze final par datation radiocarbone ou par le rare mobilier céramique qu’elles ont livré, elles ne sont jamais directement associées à des tombes ou à des monuments. Leur distribution suggère néanmoins un lien possible avec l’espace funéraire, par exemple dans le cadre de cérémonies funéraires ou commémoratives.

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Structure de combustion à pierre chauffée de la fin du Bronze final (chantier Lot 9 secteur sud-ouest). 

© Inrap

Au-delà de ses apports pour d’autres périodes et dans d’autres domaines, le suivi archéologique du PIPA offre l’opportunité, pour la première fois dans la région lyonnaise, d’appréhender l’évolution sur le temps long des pratiques funéraires de l’âge du Bronze, dans le contexte d’une vaste nécropole de plaine alluviale. La fonction funéraire du lieu se pérennise en effet durant le premier âge du Fer, tant au nord qu’au sud du PIPA.

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Fouille d’une structure de combustion à pierre chauffée de la fin du Bronze final (chantier Lot 9 secteur sud-ouest). 

© Inrap

Aménagement : SMPIPA
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Auvergne – Rhône-Alpes)
Recherches archéologiques
: Inrap
Coordination : Anne-Claude Remy, Inrap
Responsables scientifiques des opérations de fouille : Cécile Ramponi, Anne-Claude Remy, Christine Ronco, Sylvie Saintot, et Ellébore Segain, Inrap
Rédaction : Jean-Michel Treffort et Ellébore Segain, Inrap