Les archéologues de l’Inrap fouillent actuellement, sur prescription de l’État (Drac Bretagne), plus de 7 hectares à la Chapelle-des-Fougeretz. Le chantier, qui se poursuivra jusqu’en octobre 2022, met en évidence un important sanctuaire gallo-romain. 

Dernière modification
15 juin 2022

Si la découverte de lieux sacrés antiques n’est pas rare, les recherches autour de cet ensemble cultuel révèlent non seulement les vestiges de bâtiments bien conservés mais également l’organisation d’ensemble du sanctuaire et de son environnement. Elles offrent ainsi une plongée dans la vie quotidienne d’un important lieu de culte gallo-romain des environs de Condate (Rennes), donnant à voir l’organisation architecturale et sociale d’un lieu central de la vie publique antique.

Un imposant sanctuaire traverse le temps

Positionné en hauteur, à 10 km à peine de Condate, le sanctuaire était visible de très loin. À l’ouest, il domine la vallée de la Flume, à l’est le bassin de Rennes et au nord la grande voie romaine qui relie Rennes à Corseul. Si son implantation montre l’importance qu’il occupe dans l’organisation de la vie antique, sa découverte renseigne sur la manière dont les populations celtes locales, les Riedones, intègrent progressivement les pratiques religieuses et sociales romaines. Le sanctuaire est en effet fondé à la période suivant la conquête romaine au Ier siècle avant J.-C. et il fonctionne durant au moins cinq siècles, jusqu’au IVe siècle de notre ère.

L’ensemble cultuel se compose d’un vaste espace sacré, délimité par une galerie à colonnades de 60 m de côté. Cette dernière entoure deux temples. De taille différente, ils sont bâtis sur un même plan, le fanum, typique de la Gaule. Autour de la cella, une pièce centrale dans laquelle se tenait la statue d’une divinité, une galerie est dédiée aux dévotions et aux déambulations des fidèles. Le plus grand temple est habituellement dédié à une ou des divinités tutélaires, le plus petit abritant une ou plusieurs divinités secondaires. L’espace sacré est précédé par une avant-cour dotée d’un puits et de deux petits monuments pouvant correspondre à des « chapelles ». Ce lieu devait service d’esplanade et accueillir la foule de dévots lors des cérémonies communautaires.

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Évocation du sanctuaire de la Chapelle-des-Fougeretz dont les bâtiments, ici en contexte rural, s’apparentent à ceux retrouvés à Saint-Valérien.

© Marie Millet, Inrap


La fouille de la Chapelle-des-Fougeretz a livré une petite figurine en bronze du dieu Mars, laissant penser qu’au moins un des temples lui était dédié. En Gaule romaine, cette divinité est une figure protectrice et bienveillante, éloignée de l’image belliqueuse du dieu de la guerre. Autre objet sacré mis au jour, une remarquable coupe en bronze présente un décor à la thématique jupitérienne (aigle et foudre figurés sur les deux anses).
La fouille a également mis au jour certains des dons plus communs déposés (ou jetés) par les dévots : de menus objets comme des parures (fibules) ou des offrandes monétaires.

Plusieurs urnes datées de la fin du premier âge du Fer (-500 avant J.-C.) ont aussi été retrouvées sur le site. Les archéologues espèrent atteindre ces niveaux antérieurs, qui pourraient confirmer la continuité d’occupation du secteur et de sa vocation cultuelle à travers les siècles.

Aux abords du sanctuaire, un édifice thermal et le village du personnel

En contrebas, la fouille a révélé un édifice thermal de 120 m². Ces bains ont été une véritable surprise pour les archéologues. Symbole d’un mode de vie à la romaine, ils étaient probablement à usage public et destinés aux fidèles du sanctuaire. Très arasé, le bâtiment a fait l’objet d’une forte récupération de matériaux à la fin de l’Antiquité. De son architecture subsistent cependant quelques éléments dont des fragments de décors peints, les vestiges d’un système de chauffage par le sol (hypocauste) et les restes de bassins. L’édifice est constitué de cinq pièces et présente un parcours thermal classique : le baigneur accédait au bâtiment depuis une galerie qui servait de vestiaire (apodyterium). Une fois dévêtu, il se dirigeait vers les salles chauffées. Il pénétrait d’abord dans une pièce tiède (tepidarium) afin de réaliser un nettoyage corporel puis accédait ensuite à la salle chaude (caldarium) où la température permettait la sudation. Le parcours se terminait par une pièce froide équipée d’un bassin dans lequel le baigneur subissait un choc thermique destiné à raffermir la peau. Les bains étaient alimentés en eau par un puits situé à quelques mètres.

À l’est du sanctuaire, des fossés délimitent une série de parcelles livrant les restes de quelques habitations. Dans ces espaces sont creusées de nombreuses fosses, parfois de grande dimension. Vestiges de pièces excavées ou d’ateliers semi-enterrés, ces espaces devaient être installés au sein de bâtiments construits en terre et en bois qui n’ont, quant à eux, pas laissé de traces. Ces creusements ont livré de nombreux objets témoins d’activités domestiques, notamment des tessons de céramiques et des objets en fer. Cet habitat correspond probablement à un village destiné au personnel chargé de l’entretien du sanctuaire. La suite de la fouille pourrait permettre d’explorer ces espaces résidentiels de manière plus exhaustive.

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Fouille à la Chapelle-des-Fougeretz.

© Emmanuelle Collado, Inrap


La fouille sera ouverte au public lors des Journées européennes de l’archéologie, voir le site.

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Aménagement : SNC Sud Chapelle (co-aménagement Groupe Giboire et Groupe Launay)
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (DRAC Bretagne)
Recherche archéologique:  Inrap
Responsable scientifique : Bastien Simier, Inrap