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Les thermes antiques d'Évaux-les-Bains (Creuse)
À Évaux-les-Bains, une fouille de l'Inrap a permis de mettre au jour les thermes antiques de la ville, partiellement connus depuis le XVIIIe siècle, mais également de révéler l’existence de nouveaux espaces remarquablement conservés.
Depuis avril 2022, une équipe d’archéologues de l’Inrap conduit une fouille à Évaux-les Bains, en amont d’un projet d’aménagement porté par la société d’économie mixte Thermale d’Évaux-Les-Bains.
Initiée et élaborée par le Service régional de l’archéologie de la Direction régionale des Affaires culturelles (DRAC) de Nouvelle-Aquitaine, cette intervention visait initialement à l’étude scientifique des vestiges gallo-romains, classés Monuments historiques dès 1840 et sur l’emprise desquels le projet d’extension prévoyait d’empiéter. Déployée sur une superficie d’environ 900 m², l’opération a toutefois révélé tout un pan jusqu’ici inconnu du site antique.
Vue générale du site en cours de fouille.
© C. Mangier, Inrap
Les thermes gallo-romains
Les thermes antiques d’Évaux-les-Bains sont édifiés entre la fin du Ier et du IIe siècle à l’endroit même où jaillissent des sources naturelles d’eau chaude, exploitées jusqu’aux environs du IVe siècle, avant de tomber dans l’oubli. Redécouvertes au XVIIe siècle, ces sources connaissent un regain d’intérêt au siècle suivant avec l’apparition de maisons de bains, dont les travaux de construction mettent au jour les vestiges antiques. Des fouilles importantes sont alors menées entre 1838 et 1847, puis à partir de 1858 lors de la construction du Grand Hôtel, qui révèlent progressivement l’existence de bassins, de puits, de canaux et de pièces entières, enfouis sous plusieurs mètres.
Plusieurs séries d’études voient le jour avant que les vestiges antiques ne disparaissent une nouvelle fois sous l’édification de l’actuel Grand Hôtel.
Malgré leur classement sur la première liste de protection des Monuments historiques, dressée à la demande de Prosper Mérimée, ces vestiges demeuraient donc partiellement connus. Parmi les différentes publications, citons celle du docteur Georges Janicaud qui livre, en 1934, un plan synthétique, qui constituait jusqu’à présent l’étendue de notre connaissance du site gallo-romain.
L’opération de fouilles menée depuis le mois d’avril 2022 sur la moitié de la parcelle classée, a donc non seulement permis de redécouvrir ces vestiges, mais également de révéler l’existence de nouveaux espaces.
Des vestiges dans un état de conservation remarquable
La partie nord de l’édifice antique d’Évaux-les-Bains se caractérise par quatre bassins inscrits dans un ensemble de plan rectangulaire de 19 m de long par 17 m de large. À l’est, à l’ouest et au nord se trouvent des bassins de plan rectangulaire, tandis que la partie sud est occupée par le bassin de plan circulaire de 7,80m de diamètre.
Il s’agirait du caldarium, au centre duquel trois sources d’eau très chaudes jaillissaient autour d’une colonne en marbre noir surmontée d’un chapiteau et d’une petite statue. Cette salle, la plus luxueuse des thermes, était vraisemblablement couverte par une coupole ornée de mosaïques de pierres et matériaux précieux de différentes couleurs. Les eaux de ce bassin se déversaient ensuite vers le bassin rectangulaire nord contigu, nouvellement dégagé, à l’ouest duquel l’angle nord-ouest du bassin occidental, totalement inconnu, a été mis à jour. Parfaitement conservé avec son dallage en calcaire, ce bassin d’au moins 1,50 m de haut faisait probablement office de tepidarium, ou bassin d’eau tiède.
Vestiges d'un sol antique dallé de calcaire mis au jour entre le bassin circulaire et le bassin est. Il s'agit vraisemblablement d'un couloir desservant le bassin circulaire et l'escalier d'accès au bassin est.
© Frédéric Méténier, Inrap
Vue de l'angle nord-ouest du bassin ouest, vestiges de banquettes en périphérie de ce bassin.
© Frédéric Méténier, Inrap
Des salles inédites et de nouvelles hypothèses
Les travaux ont également mis en évidence des extensions, elles aussi, jusque-là inconnues. Le bassin quadrangulaire est en effet séparé du bâtiment XIXe par une large maçonnerie qui pourrait marquer la limite d’un premier état de construction et au nord de laquelle s’appuie une structure en exèdre d’un diamètre d’environ 11 mètres qui s’étend jusque sous la galerie de l’hôtel. À l’est de celle-ci, une autre construction inédite a été découverte : partiellement visible en raison de réaménagements récents, elle présente un plan quadrangulaire mais révèle également un plan interne absidial.
Le bassin oriental, qui semble avoir été le frigidarium est quant à lui en partie conservé comme en atteste la présence d’un escalier d’accès qui suppose une préservation sur plus d’un mètre de haut. Ces découvertes, qui modifient en profondeur notre connaissance des thermes antiques, impliquent également de s’interroger sur leur accès, non pas par le sud comme supposé jusqu’alors mais plus probablement vers le nord, où la façade s’ouvrait en direction de la vallée.
Contrôle scientifique et technique : Didier Rimbaud, Jacques Roger, Service régional de l’archéologie (Drac Nouvelle-Aquitaine)
Recherche archéologique : Christophe Requi, Inrap
Responsable scientifique : Frédéric Méténier, Inrap
Maîtrise d’œuvre : Atelier CENT7 Architecture, assisté d’ANALEPSE
Maîtrise d’œuvre des travaux sur le monument Architecture : Patrimoine & architecture (M. BAGUET et Mme AUBIN)
Travaux de conservation et de cristallisation des vestiges : entreprise Bouillot (Moutier d’Ahun)