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Fouille d'un ancien moulin à Châtenois (Bas-Rhin)
L'Inrap fouille actuellement à Châtenois les vestiges d'un moulin du XVIIe siècle transformé en scierie au XIXe siècle. Conjuguant archéologie du bâti et archéologie industrielle, cette fouille est une première en Alsace.
Depuis le 10 octobre 2020, une équipe d’archéologues de l’Inrap mène une fouille à Châtenois, en amont des travaux de la déviation RN59, contournement de la commune de Châtenois, portés par la Dreal. Prescrite par l’Etat (Drac Grand-Est), cette fouille d’un mois relève de l’archéologie du bâti avec l’étude des vestiges d’un moulin du XVIIe siècle et intègre l’étude de ses différentes étapes de construction jusqu’à celle d’une scierie à la fin du XIXe siècle. Il s’agit de la première fouille qui offre l’opportunité d’étudier un moulin en Alsace, une typologie de structure importante dans l’histoire de l’économie rurale.
Sur les traces d’un moulin à Châtenois
Le moulin du XVIIe siècle, dont les vestiges sont en cours de fouille, est décrit dans les archives comme un moulin à farine à deux roues. Les vestiges de ce moulin prennent la forme de plusieurs maçonneries et de niveaux de sol. Certains murs de ce moulin sont en effet encore conservés, notamment à l’emplacement du passage de l’arbre des roues, en lien avec la machinerie du moulin. L’architecture et l’organisation de ce moulin sont ainsi appréhendées de manière à mieux connaître les dispositifs de dérivation du cours d’eau en trois canaux pour une gestion précise des débits. En effet, comme l’entonne la comptine « Meunier tu dors, ton moulin va trop vite, meunier tu dors, ton moulin va trop fort », la gestion de la vitesse est un élément clé de cette industrie. Si les roues tournent trop rapidement, la farine peut s’enflammer et faire brûler le moulin, un accident fréquent au Moyen Âge et à l’époque moderne.
Vue sur la fouille en cours des vestiges d'un moulin du XVIIe siècle à Châtenois.
© Inrap
Le fait que ce moulin comporte trois canaux d’irrigation devrait faciliter son identification parmi les différents moulins de Châtenois en s’appuyant sur les données d’archives.
En périphérie immédiate du moulin, deux bâtiments aux murs de pierres apparaissent. L’un des deux bâtiments serait plus ancien car il est recoupé par un mur du moulin. Dans le second bâtiment, qui pourrait être plus récent, une imposante meule circulaire en basalte a été retrouvée.
Des vestiges sous le moulin du XVIIe siècle
Dans une pièce du moulin du XVIIe siècle, les archéologues dégagent un autre mur qui pourrait être en lien avec un état antérieur du moulin ou une installation plus ancienne mais éventuellement d’une autre nature. En effet, si des moulins à Châtenois sont signalés dans les archives dès 1434, ces dernières sont cependant trop imprécises pour connaître l’emplacement exact de ces premiers moulins le long de la rivière du Muelbach et donc pour savoir si un moulin était implanté au XVe siècle à l’emplacement de la prescription de fouille. Toutefois, le moulin Muelgraben, du XVe siècle est cité comme étant le moulin le plus en amont sur le Muelbach, il serait donc possible que le moulin en cours de fouille puisse lui correspondre. Il s’agit cependant d’une hypothèse de travail car aucun élément ne permet de l’affirmer archéologiquement à ce stade de l’étude.
Archéologie d’une scierie du XIXe siècle
Au XIXe siècle, une partie du moulin a été entaillée afin de laisser place à une scierie dont les fondations ont été profondément installées dans le sol. Les archéologues retrouvent son organisation technique et l’emplacement des machines dont un imposant banc de plus de trente mètres qui servait à couper les longs troncs d’arbres.
Conjuguant archéologie du bâti et archéologie industrielle, cette fouille est une première en Alsace permettant notamment de capitaliser des données archéologiques sur l’organisation technique, l’économie des moulins et la production de farine qui ont eu une grande importance à différentes époques.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Grand-Est)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Maxime Messner, Inrap