La fouille a permis la découverte d’un peu plus d’un millier de structures archéologiques qui correspondent pour l’essentiel à un important pôle d’occupation du Néolithique récent et à des monuments funéraires médiévaux isolés. La fouille a également mis en lumière la pauvreté des structures de l’âge du Fer relevant d'établissements de très faible statut. Un grand nombre de structures agricoles contemporaines a enfin été mis au jour.

Dernière modification
09 octobre 2024

Préalablement à l’aménagement d’un lotissement, la fouille a été effectuée sur une superficie de 5,5 ha, à la sortie sud de Pfulgriesheim. Les terrains concernés sont situés sur une petite éminence lœssique qui domine d’une vingtaine de mètres deux petites rivières, la Souffel au sud et un de ces affluents, le Leisbach, au nord.
La prescription du SRA, qui s’appuie sur les résultats d’un diagnostic réalisé en décembre 2022, portait sur la compréhension et la mise en perspective des structures d’habitats du Néolithique récents et de l’âge du Fer ainsi que sur la contextualisation de cercles funéraires du haut Moyen Âge.

Un pôle d’habitat du néolithique récent (4000-3400 avant J.-C.)

L’habitat du Néolithique récent est attesté par une série de silos creusés dans le substrat lœssique. Ces grandes structures de stockage sont très bien conservées, puisque certaines ont pu être fouillées sur près de 2 m de profondeur. Elles sont regroupées en plusieurs ensembles, séparés les uns des autres par quelques dizaines de mètres. Comme cela a déjà été observé en Alsace, aucune trace de bâtiment n’a été relevée à Pfulgriesheim ; il faut toutefois noter que, dans chacun des regroupements, un silo au moins contenait de grandes quantité de torchis brûlé, pouvant atteindre près d’une demie tonne et témoignant de la présence de constructions à proximité. Selon un schéma maintenant bien connu pour cette période dans la région, celui de la pratique des « inhumations en fosses circulaires », une dizaine de silos a livré des sépultures. L’étude de la céramique et la datation précise des vestiges permettra de vérifier la contemporanéité de ces ensembles et de proposer un modèle d’exploitation des terroirs pour cette période du Néolithique : la question d’une multitude de petits habitats voisins ou du déplacement d’une cellule domestique sur un territoire donné pourra être tranchée.

Un réseau de structures du Néolithique liées à la chasse

La fouille de Pfulgriesheim a permis de mettre au jour un ensemble d’une soixantaine de fentes, des structures qui présentent des caractéristiques particulières : de plan oblong, elles leur profil est très resserré, en forme de V, U ou Y. Au moins un possible « système », composé de plusieurs fentes disposées parallèlement selon une bande nord-sud, est perceptible à Pfulgriesheim. Bien connues pour le Néolithique dans l’est de la France, elles font l’objet de questionnements récurrents tant au sujet de leur datation précise que de leur utilisation. En effet, ces creusements ne livrent qu’exceptionnellement du mobilier, et ne peuvent être datés qu’à l’aide d’analyse 14C, avec toutes les réserves et incertitudes que cela implique. Pour ce qui est de leur fonction, en l’état actuel de la recherche, l’hypothèse d’un lien avec une activité cynégétique, essentiellement basée sur une approche comparative, est privilégiée.

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Vue en coupe d’une fente du Néolithique, Pfulgriesheim, 2023.

© Anaïs Viennot, Inrap

Deux petits habitats de La fin de l’âge du Fer (480-25 avant J.-C.)

La fouille devait permettre d’étudier deux habitats de la deuxième moitié de l’âge du Fer. Le premier, que l’on peut attribuer à la période de La Tène ancienne (480-280 avant J.-C.) s’organise autour de quelques silos et d’un bâtiments excavé de plan carré, d’un type assez classique pour la période. Le second, un peu plus tardif, date de La Tène finale (150-25 avant J.-C.). Il est structuré par un enclos, dont seuls trois côtés sont connus, installé dans la pente qui descend vers le nord de la fouille. Il s’agit très certainement d’un petit établissement rural, dont l’insertion dans un territoire plus vaste, contrôlé par des fermes fouillées à proximité devra être étudiée.

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Vue d’un bâtiment excavé de La Tène ancienne (480-280 avant J.-C.) à la fin de la fouille, Pfulgriesheim (Bas-Rhin), 2024.

© Fanny Bricka, Inrap

 

Des enclos funéraires du début du Moyen Âge (600-700 après J.-C.)

Au VIIe siècle après J.-C., trois enclos funéraires sont installés en périphérie d’une importante nécropole fouillée à quelques centaines de mètres au sud-est. De forme circulaire, d’une quinzaine de mètres de diamètre, ils sont délimités par un fossé peu profond qui entourait un tertre plus ou moins volumineux.

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Vue d’une tombe coffrée du haut Moyen Âge (600-700 après J.-C.) avant que le couvercle de dalles n’ait été soulevé, Pfulgriesheim (Bas-Rhin), 2024.

© Laure Sornin-Petit, Inrap

Deux d’entre eux, à l’ouest de la fouille sont accolés et forment un seul et même monument funéraire ; chacun comportait en son centre une tombe coffrée et recouverte d’une dalle de pierre. Seule une de ces sépultures était encore intacte, elle contenait le squelette d’un défunt enterré avec un éperon au pied gauche. Le troisième cercle funéraire n’a pas livré de tombe ; la sépulture qu’il entourait devait très certainement être construite dans la masse du tertre.

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vue d’une sépulture contenue dans une tombe coffrée du haut Moyen Âge (600-700 après J.-C.), Pfulgriesheim (Bas-Rhin), 2024.

© Yasmine Mechadi, Inrap

 

Des aménagements agricoles contemporains (XXe siècle)

Un tiers des structures mises au jour sont des aménagements agricoles contemporains, dont la datation ne peut pas être remontées au-delà du XXe siècle. Il s’agit pour la plupart d’ancrage de houblonnières ou de rangs de vigne. La confrontation de ces observations avec les photos aériennes disponibles permettra de dater plus précisément ces témoins d’un passé agricole qui ne laisse que peu de trace dans les archives et ne transparaît généralement qu’au travers de ces découvertes fugaces qui ne sont pas toujours prises en compte.

L’étude des structures découvertes lors de la fouille de Pfulgriesheim, qui n’a qu’à peine commencé, permettra d’étudier, sur une surface rarement décapée d’un seul tenant, les caractéristiques d’un habitat du Néolithique récent en Alsace. La chronologie fine des vestiges, comme l’analyse de leur répartition spatiale sera déterminante pour comprendre comment les cultivateurs de cette période occupaient le territoire qu’ils exploitaient. Le réseau des fentes mise au jour apportera, quant à lui des compléments d’informations sur la fonction de ces structures ; des études sédimentologiques et chimiques menées sur le comblement de certaines d’entre elles offriront un éclairage nouveau sur leur utilisation. Enfin, les vestiges de l’âge du Fer et du Moyen Âge ne trouveront un sens qu’une fois remis dans leur contexte, et comparés aux résultats de fouilles antérieures effectuées à proximité.

Aménagement : Deltaménagement
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Grand-Est)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique :  Clément Féliu, Inrap