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Une nécropole à Troyes, entre périodes gauloise et romaine
Jusqu'au 15 aout 2013, une équipe d'archéologues de l'Inrap mène une fouille à Troyes, impasse des Carmélites, en amont de la création de logements par la société Mon Logis.
Sur prescription de l’État (Drac Champagne-Ardenne), les chercheurs étudient, sur 1 200 m2, une nécropole du tout début de l’époque romaine. Celle-ci, dans un état de conservation exceptionnel, a été scellée par un quartier d’habitation daté des prémisses de la ville antique de Troyes, Augustobona.
Des ensembles funéraires du début de l’époque romaine
Les archéologues ont mis au jour une partie d’une vaste nécropole datée des années 30 avant notre ère. La conservation de ce site est exceptionnelle, rares sont les espaces funéraires où des niveaux de circulation sont conservés.
Cette nécropole présente une dizaine d’enclos de plan quadrangulaire délimités par des fossés. Chacun correspond à un monument funéraire dont l’entrée est visible, généralement à l’est. Dans deux enclos, les fossés contiennent des planches carbonisées probablement liées à l’architecture du monument. Au centre de ceux-ci d’importantes quantités d’amphores à vin d’origine italique concassées, constituent deux amas dont le contenu est minutieusement étudié par les archéologues. Ces amas d’amphores abritent des sépultures et recueillent également d’autres objets, comme des monnaies, de nombreux éléments de vaisselle (assiettes et pots en céramique) et des objets de parure (perles en verre, anneaux en bronze ou en or), de la fin de l’époque gauloise ou du tout début de l’époque romaine. Autour de ces amas d’amphores, le sol de l’enclos est constellé de charbons et d’esquilles d’os humains et animaux brulées, vestiges des crémations.
Des gestes funéraires très bien documentés, entre pratiques gauloises et romaines
Cette nécropole se situe durant une période charnière, la transition entre la Gaule indépendante et romaine. L’étude des vestiges permet aux archéologues d’appréhender la gestuelle et les pratiques funéraires de cette période, pour laquelle très peu de nécropoles ont été identifiées dans l’Est de la France. Cette nécropole présente aussi bien des incinérations que des inhumations.
Des bûchers destinés à la crémation des défunts ont été repérés dans certains fossés d’enclos. Leurs parois chauffées sont rubéfiées, leur comblement riche en esquilles osseuses, humaines et animales, carbonisées contient également des bûches calcinées, des fragments d’amphores et de vaisselle de table brulés. Les ossements incinérés dans les bûchers étaient prélevés pour être déposés dans les amas d’amphores situés au centre des enclos. Les archéologues en retrouvent également dans des récipients en céramique ou en matériaux périssables qui sont disposés dans les fossés des enclos. Au centre des enclos, les amphores non brulées et de la vaisselle de table ont été intentionnellement brisées et déposées, vestiges très probables de pratiques funéraires festives (des banquets ?) liées à un temps fort, que ce soit l’enterrement ou une commémoration.
Une proportion exceptionnelle de nourrissons a été inhumée dans cette nécropole. Ils sont souvent enterrés à l’écart des adultes, des fragments d’amphores suivant le contour de leur silhouette. Ces vestiges sont rares durant l’époque gauloise et le début de l’époque gallo-romaine. Différentes pratiques funéraires coexistent donc dans cette nécropole, mixant tradition et émergence de nouveaux gestes, thématique qui sera au cœur des études une fois la phase de terrain achevée.
Sur les traces de la ville romaine de Troyes
La nécropole est abandonnée durant la première moitié du Ier siècle de notre ère. Elle est remblayée par une couche de gravier afin de créer une des rues d’Augustobona, la ville romaine de Troyes. Ce sol nouvellement mis en place a ainsi protégé la nécropole. De part et d’autre de la rue, l’ancienne nécropole est progressivement recouverte par des bâtiments d’habitation ou à vocation artisanale. Ce quartier périphérique de la ville romaine est peu à peu délaissé entre les années 150 et 250 de notre ère.