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Sous les pavés, l’histoire de la Place Guy Coquille à Nevers (Nièvre)
Entre mars et avril 2024, l’Inrap a mené une fouille à Nevers, sur prescription de l’Etat (Drac Bourgogne – Franche-Comté). Cette opération de 35m² menée en amont du réaménagement de la place Guy-Coquille et du cœur de ville de Nevers a livré, les vestiges de bâtiments antiques et d’un cimetière médiéval.
La documentation fait état de l’existence, au niveau de la place Guy Coquille, d’une église paroissiale connue sous le vocable de « Saint-Père » ou « Saint-Pierre » construite à la fin du XIIe siècle et détruite à la fin du XVIIIe siècle suite à l’effondrement d’une partie de la voûte. Cette église était réputée avoir été construite sur l’emplacement du premier cimetière des chrétiens de Nevers. Des informations orales faisaient aussi mention d’un puits situé approximativement à l’emplacement de la fontaine actuelle. Celui-ci est probablement visible sur une carte ancienne (an II/an III).
Détail plan ancien de Nevers, an II – an III.
Enfin, des travaux de suivi de réseau en 1988 avaient révélé la présence de dix sarcophages le long de la bordure sud de la place (C. et M. Michaux, 1988). Un petit tronçon de mur de l’église mis au jour durant cette campagne, avait alors permis un repositionnement approximatif du plan de cette dernière. La surface prescrite se trouve à l’emplacement de ce que l’on supposait être le parvis de l’église, d’où une forte présomption de la présence de sépultures.
Vue de la place Guy Coquille en cours de fouille.
© Marie-Noëlle Pascal, Inrap
Vue de la place Guy Coquille en cours de fouille.
© Marie-Noëlle Pascal, Inrap
Vue de la place Guy Coquille en cours de fouille.
© Marie-Noëlle Pascal, Inrap
Le cimetière médiéval
Comme attendu, plusieurs sépultures ont été mises au jour dans le périmètre de la fouille (vingt-trois au total) et cela malgré les nombreux réseaux désaffectés qui quadrillaient l’espace. Plusieurs présentaient des aménagements en coffres faits de dalles calcaires ou de simples calages périphériques, les autres étaient en pleine terre.
Sépulture en coffre.
© Pierre Mazille, Inrap
A l’exception d’un individu, les sépultures étaient incomplètes, soit qu’elles aient été amputées par les creusements de réseaux contemporains, soit qu’elles soient partiellement engagées sous les bermes, ou encore qu’elles aient été perturbées anciennement par les creusements d’autres sépultures. Aucune n’a livré de mobilier correspondant à un dépôt funéraire.
Sépulture incomplète.
© Luc Staniaszek, Inrap
Le suivi de travaux de réseaux, concomitant à la fouille, a également livré plusieurs sépultures, dont une en sarcophage complet. Son couvercle présentait un décor attribuable à la période mérovingienne, confirmant l’utilisation du site comme nécropole dès le haut Moyen Âge.
Le site antique
Malgré l’exiguïté de la parcelle, la fouille s’est révélée riche en vestiges antique. Une partie de l’espace était occupée par une cave dont tous les murs ont pu être mis au jour, à l’exception de l’angle sud-est qui se trouvait hors emprise. La partie du mur sud présentait l’amorce d’un soupirail, dont on peut supposer qu’il s’ouvrait sur une rue. Dans les autres murs de la cave s’ouvraient deux niches, l’une complète à l’est, l’autre, détruite dans sa partie supérieure, au nord. Le sol de terre battue construit sur un radier de cailloux calcaires était entièrement conservé mais n’a pas livré de mobilier en place. Tous les artefacts liés à cette pièce ont été récoltés dans le remblai de démolition qui la comblait.
Vue zénithale des bâtiments antique.
© Jérôme Berthet, Inrap
Cave antique.
© Stéphane Alix, Inrap
Amorce de soupirail de la cave antique.
© Stéphane Alix, Inrap
Sous le sol, creusés dans le substrat, sont apparus trois trous de poteaux vraisemblablement liés à la construction de la cave. Celle-ci a été desservie successivement par deux escaliers. Le premier, orienté est-ouest a été partiellement récupéré puis son accès inférieur bouché. Le second, entièrement conservé, présentait un axe nord-sud. Cette modification suggère un réagencement des pièces en rez-de-chaussée, que l’étude des quelques m² fouillés à l’est de la cave nous permettra peut-être d’appréhender. Un empilement de plusieurs sols y a été mis au jour, certains comportent des foyers. Des sablières basses sont également apparues.
Trous de poteaux de liés à la construction de la cave durant l’Antiquité.
© Stéphane Alix, Inrap
Escalier desservant la cave antique.
© Stéphane Alix, Inrap
Sablières basses de la cave antique.
© Stéphane Alix, Inrap
À l’ouest de la cave, est apparu un second bâtiment, matérialisé par deux murs parallèles, dont l'un, ancré sous la berme, ne laissait voir que son parement. Là encore, sur une surface très étroite, plusieurs états de sols ont été identifiés. Les deux bâtiments ne sont pas mitoyens, mais séparés par un espace très étroit d’environ 0.30 m. Cet alignement de bâtiments en bordure d’une voie (déduite de la présence du soupirail dans la cave) est typique d’une bordure d’ilot urbain.
Enfin, la fouille a également révélé une occupation antérieure à la cave antique, sous la forme de quelques trous de poteaux, qui appartiennent très probablement à la période augusto-tibérienne, ce qui témoigne d’une extension assez précoce de la ville antique.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Bourgogne – Franche-Comté)
Recherches archéologiques : Inrap
Responsable scientifique : Marie-Noëlle Pascal, Inrap