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Sous le dallage du « plus vieux temple » de France... les vestiges d'une église médiévale à Montbéliard (Doubs)
Édifié entre 1601 et 1607 par l’architecte wurtembergeois Heinrich Schikhardt, le temple Saint-Martin de Montbéliard serait le plus ancien temple protestant conservé en France. Classé au titre des Monuments Historiques, il fait l’objet d’un vaste chantier de restauration depuis 2001 et, dernièrement, d'un projet d'installation de chauffage nécessitant un suivi de travaux par l'Inrap. En dépit du caractère très limité des ouvertures réalisées, cette opération a permis d’appréhender les vestiges de l’église médiévale Saint-Martin et de diverses structures liées au chantier de construction du temple.
L’église Saint-Martin (XIe-XIIe s. - 1607)
Les comptes de construction du temple tenus par Schikhardt indiquent que l’église (couverture, charpente et murs) a été détruite en 1603, alors même que les murs périphériques du temple étaient déjà hauts de 4 mètres. Le plan de cette église a pu être appréhendé : sa nef unique, orientée est-sud-est - ouest-nord-ouest, longue de 22 m et large de 9 m, ouvrait à l’est sur un chœur large de 6 m environ et long de plus de 5,50 m.

Vue drone du chantier à l’intérieur du temple, depuis l’ouest.
© M. Lagache
Cet édifice a subi d’importantes transformations dans le courant du XVe siècle (d’après les textes, l’église est reconstruite à « granz frais » en 1490-1491), sans doute à la suite d’un incendie dont les stigmates sont perceptibles sur le parement interne du mur sud : le mur nord de la nef a été reconstruit tandis que le niveau du sol intérieur a été exhaussé d’une cinquantaine de centimètres et qu’un puissant massif en maçonnerie (support d’un clocher ?), large de 1,60 m, a été élevé dans l’angle formé par le mur méridional du chœur et oriental de la nef.
Le sol final de l’intérieur de l’église était pour partie en terre battue et pour partie dallé, comportant notamment huit dalles funéraires. Un sol en galets ceinture les murs nord et ouest de l’église. Présentant un léger pendage, il est bordé par un caniveau à l’ouest.

Vue d’ensemble de la tranchée ouverte le long du mur sud du temple, depuis l’ouest.
© A. Vuillemin, Inrap

Relevé en photogrammétrie des vestiges mis au jour à l’intérieur du temple, avec restitution du tracé de l’église Saint-Martin dans son état final.
© Photogrammétrie M. Lagache, DAO A. Vuillemin

Vue du mur sud de l’église dont le parement interne présentant des traces d’incendie a été recouvert d’un enduit de mortier.
© A. Vuillemin, Inrap

Vue d’un massif accolé contre le mur sud du chœur de l’église et perturbé par la tranchée de fondation du mur sud du temple.
© A. Vuillemin, Inrap

Revers d’un Brûlé de Jean de Heinsberg (monnaie frappée entre 1434 et 1455) recueilli dans un niveau de remblai lié à la reconstruction de l’église.
© S. Jounin, Inrap

Vue d’une portion de sol dallé (état final de l’église) .
© A. Vuillemin, Inrap

Vue d’un ensemble de dalles funéraires participant du sol final de l’église.
© A. Vuillemin, Inrap

Vue du sol en galets ceinturant l’église au nord et à l’ouest.
© A. Vuillemin, Inrap
Le cimetière de l’église Saint-Martin (XIe-XIIe s. - 1542)
Deux inhumations ont été partiellement mises au jour dans l’église et trois autres le long du mur sud du temple (soit à l’extérieur de l’église). Ces dernières faisaient partie du cimetière de l’église, fermé et transféré en 1542.

Sépulture partiellement fouillée, au sud du mur de fondation méridional du temple.
© A. Vuillemin, Inrap
Un diagnostic opéré place Saint Martin en 2022 avait permis d’observer d’autres sépultures, dont l’une datée du XIe-XIIe s. L’édification de l’église Saint-Martin (attestée par les textes en 1341 seulement) pourrait être contemporaine de cette inhumation.

Inhumation dans un contenant en bois, datée entre 1302 et 1411, mise au jour en 2022 à l’occasion d’un diagnostic, à une dizaine de mètres au sud du temple.
© J. Maestracci, Inrap
Le chantier de construction du temple (1601 – 1607)
L’opération a également permis de documenter le chantier de construction du temple. Le sol en galets a été recouvert par un sol en terre battu et il a été transpercé par des trous pour écoperches, d’un diamètre de 0,50 m et d’une profondeur de 0,70 m environ, le long de la face interne des murs nord, ouest et sud du temple. Des aires de gâchage ont été dispersées à l’intérieur de l’édifice. Enfin, préalablement à l’installation du sol dallé du temple, un remblai épais d’une quarantaine de centimètres a été disposé sur le sol de l’église et l’arase de ses murs. Ce remblai a livré de nombreux fragments de tuiles vernissées de couleur variées, en pointe de diamant ; il s’agit sans doute des déchets liés à la couverture initiale du temple.

Vue d’une aire de gâchage liée au chantier de construction du temple .
© A. Vuillemin, Inrap
Les études spécialisées qui débutent et les analyses radiocarbones envisagées permettront de préciser le phasage de ce site au potentiel archéologique remarquable.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Direction régionale des affaires culturelles de Bourgogne - Franche-Comté)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Adrien Vuillemin, Inrap