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Premier bilan des découvertes archéologiques sur la ligne C du métro à Toulouse (Haute-Garonne)
La fouille préalable à la construction de la future station de métro – ligne C par Tisséo s’est prolongée jusqu’au 16 janvier dernier. Retour sur les derniers mois de fouilles de cet important lieu de Toulouse, qui ont livré de nouveaux vestiges de l’Antiquité, du Moyen Âge et de l’Époque moderne.
De nouveaux vestiges qui répondent aux éléments attendus… et des surprises
Entre juin et septembre, plusieurs structures archéologiques avaient été identifiées et fouillées, illustrant l’histoire de ce quartier situé à l’immédiate périphérie de la ville. Ouverte au public à l’occasion des Journées européennes du patrimoine 2024 (voir l’article publié à cette occasion), la fouille a révélé depuis de nouveaux vestiges en particulier de l’Antiquité et du haut Moyen Âge.
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Fouille en cours de la voirie de l’époque antique localisée au nord de l’emprise.
© Jean-Baptiste Jamin, Inrap
Ainsi, ont été découverts dans la moitié nord du chantier quelques aménagements, que l’on peut rattacher à la période antique au sens le plus large. Un empierrement assez fruste orienté nord-sud évoque un chemin qui marque peut-être une circulation extérieure autour de la ville. Une vaste fosse contenant de très nombreux fragments de mobiliers brûlés (verre, céramique, métal…) semble correspondre à un dépotoir destiné à recueillir les rejets d'une zone de crémation, très certainement celle en rapport avec les incinérations observées lors des fouilles voisines de 2002. Les vestiges d'un peti bâtiment, attribuable à l'Antiquité tardive, ont aussi été mis au jour dans cette même zone nord. La fonction de cet édifice, doté de plusieurs pièces, n'est pas certaine. Il pourrait correspondre à un bâtiment associé au prolongement extra-muros du decumanus maximus antique. Cependant, de ce principal axe routier est-ouest de la cité, aucune trace manifeste n'a été observée dans l'emprise du chantier. Les destructions du XIXe siècle, lors du percement du boulevard actuel, expliquent peut-être cette absence étonnante.
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Vestiges d’un petit bâtiment de l’époque antique.
© Laurent Grimbert, Inrap
Enfin, six tombes à inhumation ont été découvertes pendant la fouille. Elles s'échelonnent entre le IIe et le IXe siècle après J.-C. La plus spectaculaire d'entre elles est une tombe en bâtière datée par radiocarbone entre le milieu du IIIe siècle et le tout début du Ve. La défunte, une femme assez âgée, avait été inhumée avec un petit bijou (collier ou bracelet) dont ont été retrouvées cinq petites perles en or.
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Une des six tombes à inhumation découvertes lors de la fouille.
© Laurent Grimbert, Inrap
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Une des six tombes à inhumation découvertes lors de la fouille ; sépulture d’adolescent.
© Laurent Grimbert, Inrap
Cette faible densité de sépultures, par rapport à la densité et à la variété des pratiques funéraires (inhumations, incinérations, mausolée…) perçues lors de la fouille de la station ligne B en 2002, s'explique sans doute par une situation excentrée de la fouille de 2024 par rapport à la zone funéraire antique, qui doit se situer légèrement au nord-est de la zone d'intervention.
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Perles en or provenant d’un bijou accompagnant la défunte, décédée entre le milieu du IIIe et le début du Ve siècle.
© Laurent Grimbert, Inrap
En ce qui concerne les époques médiévale et moderne, dans la continuité des découvertes réalisées précédemment, les derniers mois de fouilles ont permis de mettre au jour de nouveaux aménagements liés à la fréquentation de cette zone de passage et au début de l'urbanisation extra-muros (faubourgs et bastides). De fait, cet ensemble de niveaux de rues, fondations d'habitats (murs, caves, puits…) et fosses dépotoirs (latrines) donnent désormais une image plus complète d'une zone densément occupée qui commence à se structurer d'un point de vue urbain.
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La fouille des fosses dépotoirs a livré différents types de mobilier documentant la vie quotidienne de la fin de l’Antiquité à l’Époque Moderne.
© Laurent Grimbert, Inrap
Les comblements de ces fosses latrines ont par ailleurs livré des éléments de mobilier très variés (céramique, faune, verre, métal, mobilier en bois…) qui ouvrent une nouvelle fenêtre d'exploration sur la vie quotidienne des Toulousains durant le Moyen Âge.
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Coupe en céramique de type « dérivée de sigillée paléochrétienne » (IVe-Ve siècles) mise au jour dans une fosse dépotoir.
© Laurent Grimbert, Inrap
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Cuillère en bois du Moyen Âge mise au jour dans une fosse dépotoir.
© Laurent Grimbert, Inrap
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Coupe à boire du XVe siècle mise au jour dans une fosse dépotoir.
© Laurent Grimbert, Inrap
Une partie des aménagements défensifs médiévaux avait été observée pendant les premiers mois de l’opération dans la moitié ouest du chantier. Si la limite est du fossé majeur de la ville a été dégagée sur une partie de son tracé, donnant de précieuses indications sur sa position réelle, le pont et la barbacane qui devaient lui être associés n'ont pas été retrouvés malgré leur proximité supposée.
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Seul élément défensif conservé en élévation dans l’emprise de la fouille : le mur de contrescarpe.
© Laurent Grimbert, Inrap
En revanche, dans la partie sud de l’emprise, les archéologues ont eu la surprise de mettre au jour un pont sur arche en briques particulièrement bien conservé, correspondant au dispositif de franchissement du fossé de l'aqueduc moderne (XVIe siècle).
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Vue générale de l’aqueduc moderne face nord.
© Laurent Grimbert, Inrap
Un bilan provisoire en attendant les études en laboratoire et les prochaines fouilles liées à la construction de la ligne C du métro
Après sept mois de présence sur site, la fouille est désormais terminée. Pour l’équipe d’archéologues, cette opération aura été exceptionnelle en raison de l’envergure du chantier et de la coactivité avec les entreprises chargées de la construction de la future station – une situation certes fréquente pour les fouilles en contexte urbain, mais rarement à une telle échelle. De fait, ce chantier titanesque aura conduit les différents corps de métiers à collaborer au quotidien, chacun apprenant au fur et à mesure les spécificités du travail de l'autre.
L’activité archéologique s’est également adaptée aux contraintes techniques induites par un aménagement aussi important : les archéologues se sont ainsi retrouvés à fouiller sous des butons retenant les parois moulées encadrant le secteur nord de l’emprise, tandis que, de novembre 2024 à janvier 2025, la dernière phase de fouille s'est déroulée "en taupe", sous les dalles en béton correspondant au futur niveau de circulation du carrefour, coulées après une première phase de fouille des premiers mètres de stratigraphie.
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Vue générale de la fouille, en coactivité avec Tisséo.
© Jean-Baptiste Jamin, Inrap
À la suite d’une dernière phase de surveillance de travaux, les archéologues ont quitté le terrain, désormais pleinement investi par les équipes en charge de la construction de la station. Pour autant, le travail des archéologues se poursuit dorénavant en laboratoire. En effet, l’ensemble des données et des mobiliers collectés en 2024 va maintenant faire l’objet d’études approfondies par différents spécialistes (anthropologues, céramologues, carpologues…). Une seconde et dernière phase d’intervention de l’Inrap doit ensuite se dérouler au printemps 2026 lors des travaux liés au futur accès est de la station, au débouché de la rue des Frères Lion. Cette ultime phase archéologique sera l’occasion de préciser les analyses et les hypothèses de 2024, et sans doute de faire de nouvelles découvertes.
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Francois Verdier 2 bilan – z2 : Laurent Grimbert (à gauche) présente les découvertes réalisées sur la fouille de la station de métro François Verdier – ligne C à Catherine Utrera, directrice de l’interrégion Midi-Méditerranée, Gilles Habasque, responsable du projet pour Tisséo Ingénierie, Dominique Garcia, Président de l’Inrap et Daniel Guérin, Directeur général délégué.
© Jean-Baptiste Jamin, Inrap
Par ailleurs, la collaboration entre l’Inrap et Tisséo va d’ici là se prolonger avec le démarrage au printemps 2025 d’une nouvelle fouille place Saint-Aubin, où la construction d’un nouvel aménagement lié à la ligne C constitue une opportunité d’en apprendre plus sur ce quartier de Toulouse.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Occitanie)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Laurent Grimbert, Inrap