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Place des Martyrs
À Alger, le diagnostic archéologique avait pour but d'évaluer le potentiel archéologique à l'emplacement de la future station de métro Place des Martyrs qui doit être implantée sur 7 000 m2 au pied Casbah d'Alger, site inscrit au Patrimoine mondial.
Deux sondages ont été ouverts aux extrémités nord et sud du projet d'aménagement. Ils ont permis de reconnaître les niveaux archéologiques jusqu'au rocher situé à 7 m de profondeur.
Alger recouvre l'ancien comptoir punique d'Ikosim, dont les plus anciens vestiges découverts à ce jour remontent au IIIe siècle avant notre ère. Les sondages ont recoupé un ancien vallon situé au pied de la Casbah, dont la première occupation attestée date de la période augustéenne.
Au IIe siècle, la ville, qui adopte le nom romanisé d'Icosium, s'étend et des constructions sont édifiées dans le vallon qui s'est comblé : un quartier d'habitations au nord, un bâtiment de grande taille au sud, malheureusement arasé ultérieurement lors de la construction d'une basilique. Cette occupation se maintiendra jusqu'à la fin du Ve siècle.
L'extension maximale de la basilique n'a pu être reconnu : seule une partie de la nef centrale, large de près de 10 m, ainsi que le départ des bas côtés ont été dégagés. De puissants massifs de fondation supportent les colonnes dont subsistent deux bases moulurées. Le sol, initialement recouvert d'un pavement en béton lissé, a reçu une mosaïque dans un second temps, probablement au début du Ve siècle. Le décor central polychrome s'organise autour de cercles denticulés et de noeuds de Salomon de couleur verte, rouge, noire et blanche. Celui des bas-côtés, plus simple, est constitué de cercles sécants noirs et blancs. Il subsiste dans le chœur des aménagements liés à la liturgie : soubassement mouluré d'un podium et trous de fixation d'une clôture basse. La basilique est abandonnée à la fin Ve siècle. La déprise urbaine est alors marquée par des niveaux de colluvions liées au ravinement des pentes proches.
Au VIIe siècle, une vaste nécropole s'installe dans les ruines du quartier. Les tombes, orientées est-ouest, sont disposées en rangées et fermées de grandes dalles de grès.
L'époque médiévale voit la mise en place de nouvelles constructions qu'il est encore difficile de situer, entre le XIe et le XIVe siècle. Les espaces situés le plus au sud ont servi de dépotoir pour des ateliers de potiers aux XIe-XIIe siècles.
Les vestiges de la période ottomane sont bien représentés : habitations au nord, quartier artisanal au sud avec la mise au jour de deux rues pavées et d'un atelier de ferronnerie. Les sols de travail de l'atelier de ferronnerie sont bâtis en briquettes sur des voûtes encore en élévation et comportent des aménagements liés au travail du métal : fours et forges.
Enfin la période coloniale a laissé son empreinte lors de la transformation des maisons préexistantes, la construction des caves voûtées de l'hôtel de la Régence, ou les terrassements pour ce qui deviendra la place des Martyrs.
Ces données nouvelles relancent l'intérêt que porte la capitale algérienne à son passé ancien et à ses origines. Si les vestiges des colonisations romaines et ottomanes étaient attendus, le vaste cimetière d'époque byzantine comprenant plusieurs centaines de tombes est une surprise.