Cette fouille programmée est le résultat de la volonté de la mairie de Saint-Dizier de développer les connaissances sur le terroir sud de la commune. En effet, le diagnostic réalisé par Rapahël Durost (Inrap, 200) a révélé le potentiel archéologique de cette parcelle (villa romaine et nécropole supposée du haut Moyen Âge).

Dernière modification
13 juillet 2016

La mairie s'étant énormément investie dans la mise en valeur des trois tombes de chefs francs fouillées à proximité par Marie-Cécile Truc (Inrap, 2001-2002), il lui a semblé intéressant de compléter les recherches dans le secteur en se penchant sur le lien possible entre la nécropole contemporaine et le lieu de vie mitoyen d'un riche propriétaire gallo-romain, la villa des Crassées. Le projet initial d'aménagement de la parcelle ayant été abandonné, la mairie s'est porté acquéreur du terrain.


Les premiers résultats sur l'occupation funéraire

La première année de fouille programmée avait pour objectif d'estimer le potentiel funéraire sur la partie supposée la plus dense de la parcelle. L'objectif a été atteint. En effet, nous avons pu observer au moins trois strates de sépultures à l'amorce du plateau. En trois semaines de fouilles avec vingt bénévoles, trente sept sépultures ont été fouillées. Malgré l'occupation industrielle qui a fortement endommagé ponctuellement les niveaux supérieurs de l'espace sépulcral, l'occupation funéraire conservée dans la fenêtre reste très dense.
Les pratiques funéraires observées laissent penser à une chronologie plus récente qu'attendue. En effet, la forme des fosses sépulcrales, leurs tailles et leurs aménagements (calage céphalique, baquette), plaident pour une datation tardive. De plus, parmi les deux sarcophages qui ont été découverts, il est évident que le squelette en place de l'un d'eux n'est pas l'occupant primaire. Une telle réutilisation est un indice supplémentaire pour une datation tardive de la nécropole. La présence de réductions, soit dans le remplissage des fosses sépulcrales, soit en amas d'os individualisés témoigne elle aussi d'une occupation sur une longue durée ainsi qu'une gestion raisonnée des morts. On peut par ailleurs noter que les individus sont inhumés sur le dos (à une exception près) et que les membres supérieurs se localisent plutôt sur l'abdomen ou sur les parties supérieures du thorax. Il s'agit là encore d'indices d'une datation récente.
En ce qui concerne les espaces de décomposition, ils sont définis comme intermédiaires dans la plupart des cas. La présence d'une enveloppe souple contraignante est quant à elle mise en évidence uniquement sur des individus immatures. Enfin, l'absence de mobilier conforte à nouveau l'hypothèse d'une datation tardive de cette partie de la nécropole.

Trois échantillons osseux ont été envoyés au Centrum voor isotopenonderzoek de l'université de Groningen au Pays-Bas avec l'objectif de déterminé la dernière phase d'occupation du cimetière. Celle-ci remonte,  dans l'état actuel des données,  au XIe siècle voire la fin du XIIe siècle.

Des études complémentaires sont en cours, mais d'après les observations de terrain, les squelettes ne semblent pas issus d'une population dite naturelle. En effet, même si les enfants sont moins nombreux qu'attendus pour une population naturelle pré-jennérien, ils restent très nombreux (environ 38 % de l'effectif) pour une nécropole mérovingienne, où ils sont traditionnellement assez rares (autour de 10-12 % de l'effectif). Enfin, les individus immatures semblent réunis dans un même espace, ce qui est là encore une tradition généralement plus tardive.

Cette année de fouille ouvre un nouveau champ d'investigation. En effet, la problématique initiale se penchait  sur les modalités de la transition entre la villa gallo-romaine et la nécropole mérovingienne. Maintenant, la fouille de cette nécropole pourrait permettre d'obtenir une vision d'ensemble de l'évolution de l'espace funéraire de son installation près d'une villa, jusqu'à son abandons tardif.