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Les Battants
Le secteur étudié est localisé à la jonction de la bordure orientale du lit majeur et des premiers coteaux de la terrasse alluviale, à environ 1 km du lit actuel de la rivière au lieu-dit Les Battants (Meuse).
Les découvertes fortuites réalisées dès 1838 sur le territoire communal (épée "gauloise", torques à tampons du début du second âge du Fer...) et les traces tumulaires repérées par les prospections aériennes contemporaines offrent un aspect du contexte archéologique de cette opération préventive liée au franchissement ferroviaire de la Meuse.
Les diagnostics préalables effectués au printemps 2002 avaient permis d'enregistrer un potentiel archéologique structuré relatif à une nécropole et à des traces d'habitat de faible densité implantés en bordure d'un ancien chenal de la Meuse. C'est d'ailleurs dans le comblement supérieur de ce paléochenal qu'avait été exhumée une grande épingle en alliage cuivreux datée du Bronze moyen, élément de parure funéraire le plus ancien du gisement et de localisation la plus occidentale connue à ce jour. Le résultat le plus significatif de la fouille, référencée évaluation 208, concerne la mise au jour d'une nécropole de la transition des VIe et Ve av. n. è.
De par l'envergure du décapage, soit 8 000 m2, cette fouille archéologique est la première du genre dans le département. La nécropole s'organise selon une bande d'environ 70 m de large et suit un axe nord-est/sud-ouest. L'aire funéraire n'est donc pas connue dans son intégralité. Les vestiges immobiliers les plus remarquables concernent 17 enclos fossoyés dont la majorité présentent un tracé circulaire de 7 à 20 m de diamètre et disposent pour la plupart d'une ouverture vers l'est. Le fossé délimite l'emplacement d'un "monument" ou tumulus constitué d'un tertre de terre aujourd'hui arasé. Sur les quatre enclos de plan quadrangulaire, trois présentent la particularité d'être délimités par quatre poteaux d'angle et ceinturent avec le fossé un espace interne inférieur à 35 m2. Ce type d'infrastructure, où l'existence d'une architecture au-dessus de la sépulture centrale est pressentie, est plus propre aux sites de l'âge du Fer de la zone Aisne/Marne qu'à ceux de l'espace Moselle/Meurthe.
Les pratiques funéraires observées sont liées aux rites de l'inhumation et de l'incinération caractérisés par des fosses sépulcrales agencées en dehors ou à l'intérieur des enclos fossoyés. Selon les cas, l'enclos peut contenir une ou plusieurs sépultures en son sein. La signalisation par une stèle semble attestée pour une sépulture avec la présence d'un bloc trapézoïdal taillé retrouvé entre deux tombes. Les sépultures des sujets inhumés sont de simples excavations rectangulaires où parfois la superposition de plusieurs squelettes dans un même creusement est visible. Ainsi, trente-huit individus inhumés et un nombre plus restreint de dix-neuf tombes à incinération ont été dénombrés.
La répartition des tombes à incinération ne montre aucune organisation ou concentration particulière. L'enfouissement du contenant cinéraire se fait dans une petite excavation, légèrement plus grande que le diamètre de l'urne utilisée. Les restes osseux calcinés sont contenus dans quinze cas à l'intérieur d'un vase en céramique. Seuls trois amas incinérés ont été déposés en pleine terre. L'exemple particulier d'une tombe birituelle associant un dépôt d'os calcinés avec une inhumation doit être signalé. Pour les trois cas d'offrandes associées à la motte d'os brûlés, ils concernent la présence de microvases et de nodules thermodéformés en alliage cuivreux.
Les sujets inhumés sont accompagnés d'offrandes métalliques et céramiques et dans plusieurs cas de pièces de viande de caprinés (mouton et chèvre) ou de cochon. Le mobilier en métal mixe des objets en alliage cuivreux (torques, bracelets, anneaux de cheville, fibules) et des objets en fer numériquement plus restreints (dague, pince à épiler, anneaux, agrafes de ceinture). La rareté des armes et la prédominance très nette des parures féminines sont à préciser. L'exemple des anneaux de cheville creux illustre la présence d'éléments de parure moins fréquents en Champagne crayeuse mais bien connu dans la vallée de la Moselle, entre autres sur la nécropole de Mondelange. Certains types de mobilier comme les torques torsadés montrent la forte influence culturelle de l'Aisne et de la Marne et confirment par conséquent le rôle de carrefour que joue la vallée de la Meuse à la transition des âges du Fer.
L'analyse de l'ensemble du mobilier permet d'établir que la partie décapée de la nécropole fonctionne entre le Hallstatt C et La Tène D. Cependant, la datation de la majorité des structures funéraires concerne la transition Hallstatt D3/La Tène A.
Sept bâtiments à quatre poteaux dont la surface interne n'excède pas 5 m2, plus communément dénommés sous le terme "greniers surélevés", sont associés aux vestiges funéraires. Ils seraient chronologiquement antérieurs ou postérieurs à l'occupation de l'espace tumulaire. Toutefois, deux de ces constructions, dont les poteaux présentent l'aspect de piquets et offrent une emprise au sol n'excédant pas 2 m2, pourraient être liées à des structures particulières de type funéraire.
Un axe viaire antique, attesté entre autres par la présence de nombreuses ornières de chariots, a été dégagé sur une distance de 38 m et une largeur de 9 m. D'orientation nord-ouest/sud-est, le tracé recoupe deux tumuli de la nécropole. La limite ouest est bordée par un ensemble de fosses d'extraction de grouine calcaire, elles-mêmes contiguës à des sillons croisés. Ces vestiges de labours, relatifs au passage d'un araire ou d'une charrue, sont parallèles à l'axe antique. Leur relation stratigraphique avec ce dernier et les enclos protohistoriques n'a pu être déterminée. Cette voie antique serait l'axe de circulation gallo-romain de rive droite de la Meuse qui relie Verodunum (Verdun).