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Le Mont Blanc
Un établissement aristocratique gaulois à Savigny-le-Temple, Seine-et-Marne ?
En amont de la construction de la ZAC du Mont Blanc à Savigny-le-Temple, quatre campagnes de fouilles ont mis au jour d'importants vestiges montrant une continuité de l'occupation de la fin du deuxième âge du Fer jusqu'à la période gallo-romaine. La surface décapée pour les fouilles totalise 6,35 ha.
Située au niveau d'une zone de contact entre le territoire de la tribu des Sénons et des Parisii, l'occupation gauloise est représentée par deux trames dont les orientations divergent assez sensiblement. Chacune d'elles associe à l'orientation de ses fossés un ensemble d'unités architecturales et de structures. La trame principale renvoie manifestement à la configuration d'un établissement rural de type résidence aristocratique. On y retrouve, comme dans certains exemples du nord de la Gaule, un principe de bipartition préfigurant, semble-t-il, la division pars urbana/pars rustica des villae gallo-romaines. Son évolution a eu lieu de façon rapide, à La Tène finale, à partir d'un enclos résidentiel légèrement trapézoïdal au sein duquel se détache un bâtiment isolé. L'enclos est par ailleurs associé à un espace, de type avant-cour, dont la surface est deux fois plus importante. On y distingue deux unités domestiques regroupant des bâtiments et des structures annexes, distribuées autour d'une cour centrale. Cette élaboration géométrique rigoureuse semble indiquer que ce sont les caractéristiques (morphologie, orientations, dimensions) de l'espace résidentiel qui ont été partiellement prises comme références pour l'adjonction des modules ultérieurs. On ne peut exclure le registre symbolique des éléments pris en compte pour l'agencement des différents ensembles autour de l'entité primordiale. À l'instar de l'enclos sud, des éléments venant se greffer au noyau central ont pu entretenir une relation de type satellitaire via un long fossé rectiligne. Ce phénomène, favorisant l'implantation de nouvelles occupations par déplacements successifs, pourrait très bien résulter d'une division de la cellule familiale à la suite de son élargissement ou de la création d'une nouvelle ère, réservée à une activité spécifique.
Si l'analyse des vestiges immobiliers permet aisément de déceler une hiérarchisation au sein de cette occupation, il en va autrement du matériel archéologique si l'on compare ce dernier à celui des sites de même rang. En dehors des fragments d'amphores italiques et d'une crémaillère articulée, le corpus habituellement attaché aux habitats aristocratiques (importations, armes, parures, reliefs de consommation collective, monnaies...) est relativement indigent.
Un autre ensemble s'organise en fonction des axes de deux fossés quasi perpendiculaires. Il regroupe trois à sept unités architecturales sur poteaux porteurs auxquelles s'ajoute un exemplaire assez rare de puits maçonné présentant un conduit de section carrée bâtie. Au Haut-Empire, la restructuration de l'espace s'est appuyée sur les trames préexistantes. Ces dernières ont servi en partie de canevas à un système de voirie matérialisé par deux fossés bordiers raccordés à un réseau parcellaire. Un chemin est implanté à l'ouest de l'emprise de l'établissement gaulois. Sa largeur inhabituelle évoque celle de certaines voies. À son débouché, deux fossés se développent en éventail dans des directions opposées. L'un d'eux borde le flanc oriental de l'enclos sud tandis que l'autre rejoint la partie basse du site. Manifestement, le tracé de la voirie semble avoir pris en compte la présence d'une entité à préserver. On constate en effet une rupture de sa rectitude ainsi qu'un net rétrécissement de sa largeur. Aucun indice matériel ne permet de déterminer avec précision ce qui a pu occasionner ce contournement. On peut envisager la présence d'un arbre remarquable, d'un bosquet, d'une zone cultivée, d'un espace réservé à une activité particulière voire d'un lieu de culte ou d'une unité architecturale n'ayant pas laissé de traces au sol.