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Le cimetière médiéval et moderne d’Aulnat (Puy-de-Dôme)
À Aulnat, l’Inrap a mis au jour les vestiges d’un cimetière occupé dans le courant du Moyen Âge, puis durant une partie de l’époque moderne. Les fouilles en cours ont déjà livré 600 sépultures illustrant l’évolution des pratiques funéraires et de la population inhumée.
Une petite parcelle située en périphérie du centre-ville d’Aulnat est actuellement fouillée par une équipe d’archéologues de l’Inrap, sur prescription de l’État (Drac Auvergne - Rhône-Alpes), en préalable à la construction d’une villa individuelle. Ce secteur, autrefois agreste, est occupé par un cimetière, distant de plus de 300 mètres de l’église paroissiale du village. Outre cette particularité, unique dans la région de la Limagne, l’espace funéraire semble avoir fonctionné entre le XIe et le XVIIe siècle, peut-être de façon discontinue.
Des sépultures médiévales rupestres
Les sépultures les plus anciennes sont creusées dans le substrat marno-calcaire, selon une orientation normée. Les creusements affectent des formes variées : oblongue, anthropomorphe, rectangulaire, avec ou sans cavité céphalique. Quelques-unes comportent en outre des blocs en aménagement, formant des sépultures soignées. À l’exception de deux monnaies dont l’une date du milieu du XIIe siècle, elles sont exemptes de mobilier et peu d’indices de port initial de linceul ou de vêtements sont notables. Les individus inhumés sont principalement des femmes et des hommes, dont plusieurs d’un âge avancé. Aucun jeune enfant n’est présent, seuls quelques adolescents comptent parmi la population.
Vue du chantier en cours de fouille.
Anaïs Delliste, Inrap
Un cimetière moderne de type paroissial
Après une possible interruption dont la durée exacte reste à préciser, une reprise de l’occupation funéraire est illustrée par une superposition dense de sépultures, installées dans les terres de Limagne. Les sépultures sont aussi bien en pleine terre qu’en cercueil, certains présentant encore du bois assez bien conservé. De nombreux éléments sont à mettre en lien avec des inhumations habillées ou en linceul : boucles de ceinture, de chaussures, tissu, épingles en alliage cuivreux… En outre, plusieurs anneaux, bagues, chapelets et médailles attestent un soin porté aux cadavres avant leur ensevelissement.
Chapelet en os et bague portée en alliage cuivreux présents dans une sépulture d’époque moderne.
Sarah Soufi, Inrap
Les rares éléments datant, comme une médaille de jubilé associée à un chapelet en grains de verre, indiquent le début du XVIIe siècle. L’échantillon exhumé correspond à une population de type villageois, comportant des femmes, des hommes, des enfants, dont de nombreux nouveau-nés et nourrissons.
Vue d’ensemble de sépultures d’époque moderne, en fosse ou en cercueil, certaines comportant des os en réduction.
Sarah Soufi, Inrap
Pour quelles populations ?
La principale question posée par cette opération archéologique concerne la caractérisation de l’occupation funéraire, surtout pour l’époque médiévale. La dissociation du cimetière du noyau ecclésial, de même que la composition de la population inhumée, interrogent en effet : s’agit-il du cimetière paroissial ou d’un cimetière particulier, lié par exemple à un hôpital, une maladrerie, un monastère ?
Les rares mentions de ce cimetière dans les sources écrites ne permettent pas pour l’instant de dévoiler son histoire, mais les premiers résultats livrés par la fouille archéologique livrent des pistes de réflexion. Il semble que les sépultures les plus anciennes contiennent une population sélectionnée, ne comptant pratiquement que des adultes. Cela peut indiquer qu’il existe une zone réservée aux plus jeunes, située en dehors de l’emprise, ou que ceux-ci n’ont pas été inhumés dans cet espace funéraire. Dans ce dernier cas, il est possible que le cimetière primitif corresponde à une population spécifique, d’autant que le nombre et la densité des sépultures semble curieuse au regard de la population du castrum d’Aulnat, comptant 57 feux au milieu du XIVe siècle, soit environ 285 habitants. La poursuite des fouilles ainsi que des recherches en archives et l’étude d’anthropologie biologique permettront sans doute de caractériser cet ensemble funéraire singulier pour la région de la Grande Limagne.
Responsable scientifique : Anne Richier, Inrap
Responsable de secteur : Anaïs Delliste, Inrap
Équipe terrain : Larbi Bensihamed, Adeline Garrucho, Sophie Heudouin, Paul Le Baron, Valério Léonardis, Eloïse Ligier, Maria Lorenzo-Martinez, Sybil Ravel, Chloé Raymond, Gautier Rolland, Sarah Soufi, Cinthy Thambirajah, Inrap