Le projet d'aménagement de la ZAC entrée sud de Gonesse occupe plus de 40 ha et a été diagnostiqué en plusieurs phases (T. Kubiak, Inrap) mettant en évidence diverses occupations depuis la Protohistoire.

Dernière modification
09 juin 2016

Un établissement gallo-romain a notamment fait l'objet d'une fouille Inrap en 2007 (T. Caparros, T. Kubiak, à paraître). Le secteur concerné par les vestiges du premier Moyen Âge n'a été prescrit qu'au troisième diagnostic positif ; les vestiges sporadiques n'avaient, les deux premières fois, pas incité à prescription.
La parcelle fouillée en 2009 s'étend sur 1 ha ; le site est donc attesté au nord, par les sondages, sur près de 3 ha, et il se poursuit sans doute au sud.


Un versant occupé dès la Protohistoire

Le site est implanté sur le bas du versant exposé nord-ouest du Croult. Les multiples coupes ont mis en évidence des dépôts colluviaux et alluviaux (dont un chenal secondaire) de la fin du Pléistocène et de la première moitié de l'Holocène. L'anthropisation et le drainage de la zone semblent être précoces, peut-être dès le Hallstatt. Ainsi, un creusement atypique comblé de lits de graviers et de sables et de phases plus limoneuses a été mis en évidence. La géométrie des graviers et des sables témoigne de courants énergiques, tandis que les limons évoquent de la décantation. Ces formations font l'objet d'une étude géoarchéologique (P. Wuscher).

Une vaste organisation de fossés

Le réseau de fossés se développe surtout à l'époque romaine et jusqu'à la période moderne : tous les creusements empruntent quasiment le même tracé en suivant la pente naturelle du terrain. Au point le plus bas, on dénombre une quinzaine de fossés se superposant sur les 3 m de hauteur de coupe. Le système gallo-romain semble prendre, au nord, la direction de l'établissement reconnu sur le plateau. Cette observation contribue à montrer que cette implantation gérait un terroir plus vaste que la limite de son enclos. Le système parcellaire de la phase moderne compte un élément nord-sud comme les périodes précédentes auquel s'ajoute un réseau laniéré de petits fossés transverses que l'on retrouve également dans les deux autres parcelles diagnostiquées dont celle en fond de vallée.
La direction de cet ensemble fossoyé diachronique nord-sud est plus ou moins celle empruntée par la route de Bonneuil, ancien chemin des Vaches. L'accumulation de colluvions buttant contre la route actuelle plaide en faveur d'une implantation ancienne de la voie. Si le talus n'a pas pu être sondé entièrement (route en activité), des échantillons ont été prélevés dans la séquence de colluvions pour une étude micromorphologique et sédimentaire (P. Wuscher).

Un secteur du XIe siècle voué à l'ensilage

Les autres types de vestiges appartiennent au premier Moyen Âge et sont essentiellement représentés par 81 silos répartis en trois concentrations distinctes, de part et d'autre de l'axe fossoyé drainant et de la voie ralliant Gonesse à Saint-Denis (route de Bonneuil). Une quatrième concentration a été repérée, plus au nord, lors de sondages en 2006 (Kubiak 2006).
Les volumes des silos font l'objet d'une étude spécifique afin de sérier la typologie et la chronologie. Un tiers des individus a fait l'objet de prélèvements et a livré des restes carpologiques qui seront étudiés par S. Preis (Inrap) et corrélés aux données spatiales.
Deux bâtiments excavés (à 2 poteaux axiaux) et trois inhumations achèvent le corpus médiéval. La datation des sépultures sera vérifiée par radiocarbone.

Des poteries à pâte sableuse rouge orangé

Le mobilier céramique médiéval recueilli est très homogène chronologiquement : il appartient exclusivement au XIe et à la première moitié du XIIe siècle. Parmi cet échantillon se trouvent quelques poteries produites dans une pâte originale pour ce secteur de l'Île-de-France. En effet, alors que les productions locales sont claires (blanche à beige foncé avec quelques pâtes rosées), celles-ci sont de couleur rouge orangé. Elles sembleraient provenir du sud de l'Île-de-France. Les formes identifiées, en pâte sableuse rouge orangé, sont pour l'essentiel des cruches à bec tubulaires (au moins 5 exemplaires) et une oule à col en bandeau, récipients très proches de ceux mis au jour à Sonchamp, dans les Yvelines (Lefèvre 2009) datés de la première moitié du XIIe siècle et produits alors localement. Au sein de plusieurs des structures de nombreux exemplaires de récipients en pâte dite « chamottée » ont également été retrouvés. Les sites offrant ce type de pâte, caractéristique des Xe-XIe siècles, sont de plus en plus nombreux : si la fonction n'est pas encore certaine, le corpus de formes s'étoffe.

Les problématiques étudiées

Les questions soulevées par cet ensemble sont multiples : les vestiges d'habitat sont-ils réellement absents du secteur ? L'organisation linéaire est-elle due à l'existence de la voie Gonesse - Saint-Denis? La sectorisation des silos est-elle fonctionnelle et/ou chronologique ? La dispersion des inhumations, par concentration, est-elle fortuite ? Quelle diffusion régionale pour les céramiques à pâte rouge ? Quel lien avec le village voisin de Bonneuil qui comprend également un grand nombre de silos du XIe siècle ? Que représente ce phénomène d'ensilage souterrain de masse qui se développe, en France, à cette période?