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Aux origines d’un quartier dijonnais : du hameau antique au prieuré aristocratique du Moyen Âge
Dans l’ancien hameau de Larrey, près de Dijon, l'Inrap a mis au jour des vestiges d'occupation remontant au Ier siècle ap. J.-C., ainsi qu'un prieuré datant de l'an mil destiné à accueillir des filles de la famille ducale et des lignages nobles de Bourgogne. La fouille de cet établissement religieux d’importance, jusqu’alors peu connu, apporte de nouvelles connaissances à l'histoire de Dijon.
L’Inrap a mené une fouille archéologique de février à avril 2021 à Dijon en amont d'un projet immobilier, suite à une prescription émise par le Service Régional d’Archéologie de Bourgogne Franche-Comté. Le projet immobilier se situe à l’emplacement de l’ancien hameau de Larrey, zone de peuplement périphérique rattachée tardivement à Dijon. Les connaissances concernant l’histoire de ce quartier étaient jusqu’alors lacunaires ; l’opération archéologique a permis de collecter de nombreuses informations : l’hypothèse selon laquelle le hameau trouverait ses origines à l’époque antique a pu être confirmée et l’installation d’un prieuré au Moyen Âge documentée.
Des traces d’occupation anciennes
Si quelques artefacts, parmi lesquels un fragment de hache polie néolithique ou des éclats de silex, témoignent de l’occupation du secteur depuis la Préhistoire, ce n’est qu’autour du Ier siècle ap. J.-C. qu'une installation humaine y semble pérenne ; en effet un niveau d’occupation riche en mobilier a pu être fouillé sur une majeure partie du site. Il a livré de la céramique en quantité, de nombreux éléments architecturaux, fibules, monnaies, tous datés d’une période comprise entre le Ier et le IVe siècle ap. J.-C. L’occupation antique ne semble pas structurée dans l’emprise de la fouille (aucun bâtiment n’a été perçu), seul un puits profond de plus de 4 m est contemporain de la couche d’occupation. Une continuité dans l’occupation a été perçue à travers plusieurs empreintes de poteaux et de niveaux de rejet charbonneux, datés de la période mérovingienne, ainsi que six défunts, inhumés selon une orientation identique nord-est/sud-ouest et dont la datation doit être confirmée par des analyses C14.
L’installation d’un prieuré autour de l’an Mil
L’étude des archives du prieuré de Larrey permet de dater sa création au début du XIe siècle, alors que le domaine dépendait déjà, depuis le VIe siècle, de l’abbaye Saint-Bénigne de Dijon. L’établissement était voué, à l’origine, à accueillir des moniales. Il s’agissait alors d’un lieu privilégié qui recevait des filles de la famille ducale et des lignages nobles de Bourgogne.
Vue par drone de la fouille et des bâtiments conservés du prieuré.
© Christophe Fouquin
« Plan général des bâtiments et jardins situés à Larey appartenant ci-devant à M.Mrs les Bénédictins », 1790. L’emprise de la fouille est matérialisée par le trait rouge.
© Bibliothèque Municipale de Dijon
Le hameau de Larrey en 1812, cadastre napoléonien.
© Archives départementales de la Côte d’Or
L’église de l’ensemble communautaire est encore en élévation, bien que transformée après sa privatisation. L’emprise de la fouille la jouxte directement, sur son flanc nord. L’opération a permis de mettre au jour de nombreuses maçonneries, particulièrement massives et dont la particularité est leur appareil en opus spicatum (rangs de pierres disposées à l’oblique), technique mise en œuvre sans doute durant le haut Moyen Âge et plus fréquemment observée entre le VIIIe et le XIe siècle en Bourgogne. Des niveaux d’occupation en lien avec les bâtiments sont conservés, ainsi que des foyers, ce qui permettra, après des analyses plus poussées, d’affiner la datation de l’ensemble.
Deux caniveaux maçonnés, fonctionnant potentiellement en même temps que les bâtiments, pourraient aussi permettre d’affiner les datations et de rattacher l’édification primitive du prieuré à une période plus précoce que le XIe siècle, le comblement de l’un d’entre eux ayant livré un tesson de céramique altomédiévale.
Une pièce quadrangulaire, interprétée comme l’ancienne chapelle latérale de l’église, a livré elle aussi au moins six sépultures, parallèles pour cinq d’entre elles au mur gouttereau de l’église.Un septième individu a bénéficié d’un traitement particulier puisqu’il est inhumé, sans doute à dessein, dans un mur latéral ouest de la chapelle.
Les vestiges avec, en arrière-plan, l’église prieurale.
© Gaëlle Pertuisot, Inrap
Vue zénithale de la chapelle latérale et des sépultures.
© Yanis Boussehaba, Inrap
Fouille d’une sépulture nichée dans un mur de la chapelle. La datation de l’ensemble permettra sans doute de confirmer qu’il s’agit d’un enfeu.
© Gaëlle Pertuisot, Inrap
Une séquence d’opus spicatum (sur un rang oblique) associée à des niveaux charbonneux.
© Céline Capdeville, Inrap
Les bâtiments et leurs niveaux de sol en cours de fouille.
© Gaëlle Pertuisot, Inrap
Un site majeur pour l’histoire de Dijon
Les données récoltées au cours de cette fouille viendront alimenter les connaissances sur un établissement religieux d’importance, jusqu’alors peu connu, si ce n’est à travers les sources écrites.
L’organisation des différents bâtiments, leur interprétation, leur datation, mais aussi l’appréhension de l’occupation antérieure au prieuré, sont autant d’éléments qui devraient pouvoir être documentés à l’issue des différentes études à venir.
Responsable d’opération : Gaëlle Pertuisot, Inrap
Responsable de secteur pour l’Antiquité : Céline Capdeville, Inrap