Une équipe de l'Inrap a mis au jour à Écouflant (Maine-et-Loire) un système complexe de captage d’eau de la nappe phréatique, en lien avec un aqueduc. Apparenté au « Qanat » apparu il y a plusieurs millénaires en Mésopotamie, puis utilisé sur le pourtour de la Méditerranée, ce dispositif hydraulique est attesté en Alsace et en Lorraine, mais il quasiment inédit dans le nord et l'ouest de la France. 

Dernière modification
13 novembre 2019


Une ferme et un ouvrage hydraulique d’époque gallo-romaine à Écouflant  
 

Une équipe de l'Inrap est intervenue à Écouflant, commune limitrophe d’Angers, dans le cadre du projet d’extension de la ZAC Provins porté par la société Alter. Les archéologues y ont étudié, sur une surface de 2,5 hectares, des traces d’occupation humaine gauloise et gallo-romaine. Ils ont notamment mis en évidence un système complexe de captage d’eau de la nappe phréatique, en lien avec un aqueduc identifié en 2014 à 400 mètres de là. Prescrite par le service régional de l’archéologie (Drac Pays de la Loire), cette opération fait suite à un diagnostic réalisé par l’Inrap en 2018. 


 
Un établissement rural du début de l’Antiquité 


Les archéologues ont mis au jour un vaste système de fossés à angles droits. Les traces les plus anciennes correspondent à un enclos gaulois qui se développe en dehors de la zone de fouille, mais pour l’essentiel les fossés caractérisent un système parcellaire d’époque gallo-romaine (deuxième moitié du Ier siècle de notre ère). Des activités agricoles devaient prendre place à l’intérieur des parcelles. Les archéologues ont retrouvé des traces d’aménagements techniques et repéré une mare. La présence de nombreux fragments de tuiles gallo-romaines suggère que le site pourrait correspondre à la partie agricole (pars rustica) d’une villa gallo-romaine, dont la partie résidentielle (pars urbana) se trouverait hors de l'emprise. De nombreux tessons de céramique ont été également recueillis.  Contemporain de ces vestiges, un édicule circulaire d’environ 4,60 m de diamètre, délimité par un empierrement de calcaire, peut-être à caractère cultuel, a été mis au jour.
 

Un dispositif original pour capter l’eau et la stocker


Dans la partie sud de l’emprise de fouille, les archéologues ont mis en évidence un dispositif complexe de captage d’eau de la nappe phréatique et de réservoir, d’époque gallo-romaine, vraisemblablement en lien avec l’aqueduc de Provins identifié un peu plus loin le long de la voie antique reliant Juliomagus (Angers) à Vindinum (Le Mans). Le dispositif comporte une série de onze forages régulièrement espacés qui auraient servi à installer un drain souterrain en blocs de grès, et une tranchée/canal courant sur un peu plus de 75 mètres, dont le tracé s’aligne sur l’axe de l’aqueduc de Provins. Le drain servait à orienter l’écoulement de l’eau et à la diriger vers la tranchée/canal qui elle même servait de réservoir et de régulateur de flux entre le captage proprement dit et l’adduction (aqueduc). L’ensemble s’apparente à un dispositif connu sous le nom de « Qanat » depuis plusieurs millénaires en Mésopotamie et utilisé aussi en Afrique du Nord, en Italie, en Espagne ou en France méditerranéenne. Cette découverte est quasiment inédite pour le nord et l'ouest de la France, alors que des exemples similaires ont été répertoriés en Indre-et-Loire, en Alsace et en Lorraine. Un deuxième édifice, carré, assez semblable (par ses dimensions et ses matériaux) à l’édicule circulaire du nord de la parcelle, a été identifié à proximité de la tranchée-canal. Visible depuis la voie, avait-il pour fonction de rappeler le nom du bienfaiteur qui aurait financé, pour l’intérêt public, l’ouvrage hydraulique?  Enfin, un four à chaux médiéval a été mis au jour qui a sans doute servi à recycler les matériaux calcaires de l’occupation antique. 
 


Aménagement : Alter
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Pays de la Loire)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Martin Pithon, Inrap