Émissions de radio
Aucun vote pour le moment
Mis à jour le
17 mai 2024
Collection
Carbone 14

Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.

Avec Jean-Louis Brunaux, archéologue, protohistorien, directeur de recherche au CNRS.

Loin d’être de simples officiants versés dans quelque sacrifice atroce, les druides, formés à une école philosophique pythagoricienne et prônant l’immortalité de l’âme, ont-ils voulu édifier une nouvelle société gauloise ?

Qui furent les druides de la Gaule indépendante et quels furent leurs rôles au sein de cette société des derniers siècles avant notre ère ? Voici une question à laquelle les archéologues sont incapables de répondre, puisqu’aucune sépulture de druide n’a jamais été découverte, et ce, malgré la fameuse tombe à char exhumée sous le tarmac de l’aéroport de Roissy, souvent évoquée comme telle.

Les druides, Posidonios, César…

Dans ses Commentaires de la Guerre des Gaules, César est peu loquace à propos de ces prêtres gaulois, dont il fait « des officiants, pratiquant des sacrifices humains ». Celui-ci mentionne toutefois qu’« ils dissertent abondamment sur les astres et leurs mouvements, sur la longueur du monde et de la terre », confirmant ainsi que ceux-ci œuvrent à l’astronomie. Philosophe stoïcien, Posidonios d’Apamée (135-51 avant notre ère), qui sillonna la Gaule du IIe siècle avant notre ère, est sans conteste la meilleure source à propos des druides et des gaulois. Hélas, la majorité de son œuvre a disparu (voir le livre XXIII des Histoires, repris par Strabon et Diodore de Sicile).

860_sc_51-le-disque-orne.jpg
Disque aux dragons provenant de la tombe de l'aéroport de Roissy. Un objet druidique ? - © Musée d'archéologie nationale - Thierry Le Maje

Les druides philosophes pythagoriciens

Un unique druide, évoqué par César, est passé à la postérité : Diviciac**,** aristocrate éduen, mentionné de surcroît par Cicéron, celui-ci l’ayant accueilli dans sa villa du mont Palatin.

Dans la Grèce du IIIe siècle avant notre ère, un traité de magie (attribué par erreur à Aristote) les compare aux mages d’Iran et aux maîtres de sagesse de l’Inde.**** Ainsi, les druides pourraient-ils être autre chose que des hommes de la prière, du sacrifice, de la conversation avec les dieux ? À l’image des Grecs, les druides sont des philosophes, d’ailleurs auraient-ils pu être les élèves de Pythagore, ou les maîtres de celui-ci ? Les deux versions existent durant l’Antiquité. Le plus important est probablement qu’ils aient formé une école philosophique prônant, à l’égal des pythagoriciens et des poètes orphiques, la croyance de l’immortalité de l’âme !

Les druides en assemblée au cœur du locus consacratus,  bâtisseurs de la Gaule

Dès le IVe siècle avant notre ère, probablement avant, les druides constituent une communauté répartie sur l’ensemble de la Gaule, communauté qui se réunira annuellement, lors de sa fameuse assemblée dans la forêt des Carnutes (aujourd’hui près d’Orléans). Ils constituent ainsi, un corps fédéré très puissant, qui aura à sa tête « le premier des druides » nous dit César.

860_sc_60-vase-peint-a-decor-zoomorphe-reserve-sur-un-fond-en-aplat-noir-120-av-j-c-decouvert-a-gandaillat-clermont-ferrand.jpg
Vase peint à décor zoomorphe réservé sur un fond en aplat noir 120 av. notre ère, découvert à Gandaillat (Clermont- Ferrand) - © Musée archéologique de la bataille de Gergovie / D.R.

Nous savons que les druides interdisent l’écriture pour le sacré, qu’il en est peut-être de même pour l’interdiction des représentations des dieux. Penseurs de l'action, les druides auraient aussi réinventé le panthéon gaulois, mettant en place un groupe de six déités, qui sont, nous dit César, les équivalents de Mercure, Apollon, Mars, Jupiter, Minerve, et Dis Pater, c’est-à-dire Pluton.

Mais, pour Jean-Louis Brunaux, « le grand œuvre » des druides aurait été d’édifier une nouvelle société, comme d’unir les Gaules, pour mieux passer de la tribu à la cité, et, de la cité à… la Gaule !

Comme l’écrit Camille Jullian, à propos des druides et de la rareté de leurs sources « si personne ne peut prétendre à trouver la vérité, tout érudit a le droit et le devoir de chercher de nouveaux problèmes » (Jullian 1924, Histoire de la Gaule). Aux philologues de reprendre leurs textes, aux archéologues de trouver des druides !

860_sc_gettyimages-115158693.jpg
Néo-druidisme en France (1999) © Getty - © Alain LE BOT / Gamma-Rapho

Pour aller plus loin

Durée :
30 min
Année :
2024