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Fouille d'un cimetière médiéval et moderne en plein cœur de Colmar (Haut-Rhin)
À Colmar, l’Inrap fouille la place de la cathédrale et met au jour l’ancien cimetière de la collégiale Saint-Martin. Les premières recherches délivrent des informations de premier ordre sur la population colmarienne à la période médiévale.
En coeur de ville, le projet de réaménagement de la place de la Cathédrale, porté par la Ville de Colmar, a motivé la prescription d’une fouille d’archéologie préventive par l’Etat (Drac Grand-Est). En effet, les données historiques et les résultats d’un diagnostic archéologique réalisé en 2015 témoignent d’une occupation ancienne de cet espace, notamment marquée par la présence du cimetière lié à la collégiale, attesté entre le XIIIe et la fin du XVIIIe siècle.
Cette fouille, qui a débuté début mai est réalisée par les archéologues de l’Inrap. Ces recherches visent à sauvegarder par l’étude le patrimoine archéologique. Elles sont menées en deux phases. Une première, de mai à fin août, dans la partie de la place située au sud du canal. Une seconde, en lien avec l’aménagement de réseaux et la plantation d’arbres, débutera en septembre sur la partie nord du canal.
Décapage de la première zone de fouille à Colmar.
© Boris Dottori, Inrap
Historique du cimetière entourant la collégiale Saint-Martin
L’actuelle collégiale Saint-Martin a succédé à plusieurs édifices, dont un premier datant du XIe siècle. Une aire funéraire s’est alors développée autour de l’église, dont les premières sources écrites remontent au XIIIe siècle. La forte évolution démographique de la cité nécessite son extension en raison des difficultés de cohabitation avec les habitants du quartier. Au XVIe siècle, cette situation aboutit à l’utilisation du cimetière Sainte-Anne, situé hors des murs de la ville et réservé depuis 1317 aux étrangers et à la population pauvre. Au début du XVIIIe siècle, le cimetière Saint-Martin est progressivement réduit, désaffecté puis définitivement évacué. L'espace "ouvert" autour de la collégiale Saint-Martin est alors aménagé en place. La fouille archéologique éclairera les origines et l’évolution du cimetière médiéval Saint-Martin.
Fouille en cours du côté sud de la Collégiale, premières observations
La fouille se déroule actuellement du côté sud de la collégiale, où la place est bordée de bâtiments médiévaux, comme l’actuel « Corps de Garde », qui correspond à l’ancienne chapelle du cimetière dédiée à Saint-Jacques, qui a notamment servi d’ossuaire jusqu’au XVIe siècle.
De ce côté de la collégiale, le cimetière a perduré jusqu’en 1533, date à laquelle l’évêque de Bâle procède à sa profanation rituelle, à la demande de la ville, qui souhaite récupérer cet espace afin notamment d’y établir un marché. Les archéologues ont observé les indices matériels de cet abandon, constitués par la mise en place d’un remblai destiné à assainir le terrain.
Sous ce remblai, les chercheurs ont d’ores et déjà mis au jour une soixantaine de sépultures, qui sont autant de précieux témoins pour la compréhension des modes de vie de la population colmarienne à la période médiévale. Leur étude permet en effet d’obtenir des informations de premier ordre concernant la population inhumée : âge au décès, sexe, état sanitaire, pathologique et parasitologique, liens de parenté ou encore régime alimentaire. L’étude précise de la position des ossements permet également de décrire les pratiques funéraires en usage à Colmar au Moyen Âge.
Sépultures en cours de fouille.
© Inrap
Sépultures en cours de fouille.
© Inrap
La sépulture « à la coquille Saint Jacques »
Une sépulture fouillée se singularise par la présence d’une coquille Saint-Jacques
perforée trouvée à proximité du squelette : cette coquille est le symbole d’un
pèlerinage accompli à Saint-Jacques-de-Compostelle, que le pèlerin ramassait sur les
plages de l’Atlantique et arborait ensuite sur son habit. Les premières observations
ont permis de déterminer que l’individu était une femme. Cette sépulture singulière
témoigne de la capacité de l’archéologie à restituer le quotidien des populations
médiévales, par le biais de découvertes qui s’annoncent assurément passionnantes
dans les mois à venir.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Grand-Est)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Boris Dottori, Inrap