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Deux ensembles antiques dans la vallée de l'Arve (Haute-Savoie)
Sur prescription et contrôle de l’État (Drac Auvergne Rhône-Alpes- service ré gional de l’archéologie), l’Inrap a réalisé deux fouilles d’archéologie préventive dans la commune de Thyez, dans la vallée de l’Arve. Ces opérations limitrophes ont permis de mettre au jour deux ensembles bâtis antiques de 350 à 400 m² de surface, qui étaient installés le long d’une voie est /ouest (actuelle route de la Plaine), non loin du centre de l’agglomération antique, et d’une voie nord/sud (actuelle avenue des Îles).
L’agglomération antique de Thyez se développait sur environ 600 m le long de la voie est/ouest qui traversait la vallée de l’Arve et 100 m de large entre la rivière de l’Arve au sud et des marais, au nord. Elle était vraisemblablement située près d’un point de franchissement de l’Arve qui pourrait avoir été localisé à 300 m en amont du pont actuel (au niveau du pont moderne des Chartreux) où un pieu de bois daté de l’Antiquité a été retrouvé dans le lit de l’actuelle rivière.
Vue générale des deux fouilles.
© Julie Boudry, Inrap
Les deux fouilles étaient situées près du centre de l’agglomération antique, au sud de la voie qui la traversait d’est en ouest, à l’emplacement d’un ancien chenal de l’Arve qui occupait les deux tiers sud de la fouille. Un chenal de l’Arve traversait en effet le secteur fouillé au cours du Premier Âge du Fer, avant le retrait de la rivière vers le sud au cours du deuxième Âge du Fer , à la faveur d’une période de répit hydrologique. L’ancien chenal, qui occupait les deux tiers sud de la fouille, formait une terrasse basse et son ancienne berge, au nord, une terrasse haute. Elles étaient toutes deux régulièrement soumises aux débordements de la rivière jusqu’au changement d’ère.
Cette zone inondable, qui était située au sud de l’axe principal qui traversait d’est en ouest le village-rue antique de Thyez, a été fréquentée à partir de l’époque augustéenne. Sa terrasse haute, située sur l’ancienne rive de l’Arve, a été remblayée dès la première moitié du Ier s ap. J.-C. La terrasse basse, située à l’emplacement de l’ancien chenal de l’Arve, a continué à être régulièrement inondée. C’est donc uniquement sur la terrasse haute, qu’est d’abord installée une occupation pérenne. La découverte de plusieurs soles foyères sur un sol en terre de plus de 75 m² semble indiquer la cour arrière d’une maison. Sur la terrasse basse, la présence d’un fossé et d’un alignement de poteaux laisse entrevoir une première structuration de ces espaces encore inondables.
Vue de la terrasse haute en cours de fouille (site de la Route de la Plaine).
© Emmanuelle Dumas, Inrap
Vestiges d’habitats de la terrasse haute.
© Emmanuelle Dumas, Inrap
Vue de la terrasse basse en cours de fouilles (site de l’Avenue des Iles.
© Emmanuelle Dumas, Inrap
Au cours du Ier s., la terrasse basse a été remblayée sur 0,4 m en moyenne pour devenir constructible. Ce terrain a accueilli au moins une maison et un bâtiment rectangulaire de 7,5 m de largeur et de 25 m de longueur au cours du Ier s. Le bâtiment rectangulaire disposait d’une pièce de 64 m² dont les murs étaient revêtus d’enduits peints et dont le sol était en béton blanc. Il a été détruit au cours du IIe s. Ses sols et sa couverture ont alors fait l’objet d’une récupération complète et ses murs, d’une récupération partielle. Ce bâtiment a ensuite été partiellement reconstruit.
Vue des deux bâtiments successifs construits sur la terrasse basse.
© Emmanuelle Dumas, Inrap
À la fin du IIe s. ou au début du IIIe s., la terrasse basse a fait l’objet d’un nouveau remblaiement destiné à niveler le terrain avant la construction d’un nouveau bâtiment de 300 m², puissamment fondé, qui pourrait avoir été destiné au stockage.
À la fin du IIIe s., au plus tôt, ce grand bâtiment a été détruit. Les matériaux de construction de ces sols et de sa couverture ont fait l’objet d’une récupération complète ; ceux de ses murs d’une récupération partielle.
Vue du bâtiment puissamment fondé.
© Emmanuelle Dumas, Inrap
La partie sud du terrain a ensuite été à nouveau remblayée pour être remise en culture ou en pâture. Au nord, quelques structures en creux, stratigraphiquement postérieures aux vestiges antiques,invitent à penser que la terrasse haute, qui était située au plus près de la voie est/ouest qui traversait l’agglomération de Thyez, a continué à être occupée après la période antique, mais l’arasement important de ces vestiges ne permet pas une caractérisation ou une datation précise.
C’est également à la fin du Haut-Empire, à une date qui reste à préciser, que l’Arve a recreusé un chenal au sud de la parcelle fouillée. Ce dernier pourrait avoir été actif au moins jusqu’au VIe ou jusqu’au VIIe s. Le terrain fouillé a alors, à nouveau, été soumis aux inondations de l’Arve. Il est ensuite resté libre de construction jusqu’à celle des maisons qui ont motivé ces deux fouilles.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Auvergne - Rhône-Alpes)
Recherches archéologiques : Inrap
Responsable scientifique : Emmanuelle Dumas, Inrap