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Vénus sortie des fouilles
Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.
Avec Marcel Otte, historien et paléoanthropologue, professeur de Préhistoire à l'université de Liège et Clément Paris, Archéologue préhistorien à l'Inrap
Carbone 14, le magazine de l'archéologie, France Culture, le dimanche de 20 h 30 à 21 h
Par Vincent Charpentier
Émission du 22 décembre 2019
À l’image de celles de Lespugue ou de Willendorf, une exceptionnelle « Vénus » vient d’être découverte dans la fouille du site d’Amiens-Renancourt. Elle s’ajoute à une remarquable série de quinze vénus brisées et dont la première fut découverte en 2014. Avec ce soir, Clément Paris et Marcel Otte.
Vue générale de la fouille du gisement d’Amiens-Renancourt
© Irwin Leullier / Inrap
Les archéologues envisagent un atelier orienté dans cette production : les sculptures s’accompagnent de plusieurs milliers de fragments de craie, dont certains semblent être des déchets de fabrication.
Sculptée dans la craie, haute de 4 centimètres, cette « Vénus » est stéatopyge : le volume du fessier, des cuisses et des seins est hypertrophié. Les bras sont juste esquissés, le visage représenté sans traits. Cette sculpture s’inscrit parfaitement dans un canon esthétique, la tradition stylistique gravettienne, qui compte les Vénus de Dolni Vestonice (république Tchèque), Khotylevo (Russie), ou celle en bas-relief de Laussel (Dordogne).
Cette « Vénus » de Renancourt porte aussi une étonnante « coiffure » réalisée par de fines incisions en quadrillage, qui n’est pas sans rappeler celle de la Vénus de Willendorf mais surtout celle de la Dame à la capuche de Brassempouy (Landes).
Ces Vénus sont connues à 200 exemplaires, des Pyrénées à la Sibérie. En France, seule une quinzaine étaient répertoriées, notamment dans le quart sud-ouest (Aquitaine, Pyrénées). Aujourd’hui, le site d’Amiens-Renancourt double le nombre de ces objets d’art gravettiens découverts en France. La fonction voire la signification de ces figurations paléolithiques restent discutées. Dès leurs premières découvertes, les préhistoriens ont voulu y voir une expression symbolique de la femme et de la fécondité, celle d’une sexualité primale, ou encore l’incarnation de déesses-mères, reflet d’un univers matriarcal. Certains y perçoivent aussi une codification, l’encadrement de la sexualité et du désir masculin par la société gravettienne. Marcel Otte, historien et paléoanthropologue, professeur de Préhistoire à l'université de Liège, y perçoit des initiations…