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Ulug Dépé et la civilisation de l’Oxus
Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.
Avec Julio Bendezu-Sarmiento, archéologue et préhistorien, spécialiste de l’Asie centrale, du Sud, et de l’Iran, chargé de recherche au CNRS, ancien directeur de la Délégation Archéologique Française en Afghanistan (DAFA).
La civilisation de l’Oxus, comme nombre de cultures archéologiques d’Asie centrale, sont peu connues en Europe, alors qu’elles sont pleinement comparables à celles des mondes élamite et mésopotamien, comme à celles des plateaux iraniens et à la vallée de l’Indus.
L’Oxus, civilisation méconnue
La civilisation de l’Oxus, comme nombre de cultures archéologiques d’Asie centrale, sont peu connues en Europe, alors qu’elles sont pleinement comparables à celles des mondes élamite et mésopotamien, comme à celles des plateaux iraniens et à la vallée de l’Indus.
La civilisation de l’Oxus, qui tire son nom de l’ancienne dénomination du fleuve de l’Amou-Daria, se développe au cours de la fin du IIIe et du début du IIe millénaire avant notre ère, entre la mer Caspienne et l’Hindou Kush, le Pakistan et l’Afghanistan. C’est durant cette période que de vraies villes émergent au cœur de cette civilisation (entre 2200 et 1700 av. notre ère). Une réelle communauté idéologique existe alors avec le nord-est de l’Iran et d’autres régions comme la Bactriane et la Margiane au cours des IIIe-IIe millénaires. Vers 1 700 avant notre ère, cette civilisation périclite, peut-être sous l’impulsion de nouvelles populations ou d’un brusque changement climatique (entre 2 000-1 800 avant notre ère), entraînant aridité et assèchement, mais aussi vent de sable du désert du Karakoum.
Ulug Dépé, cité pré-urbaine
L’histoire d’Ulug Dépé (le grand Tépé en turkmène) s’étire du VIe millénaire au 1er millénaire avant notre ère. Avec ses 30 hectares, Ulug Dépé est l’un des plus grands centres proto-urbains d’Asie centrale, juste dépassé par deux autres sites, Namazga et Altyn Dépé. A Ulug Dépé, le meilleur exemple de l’architecture monumentale du IIIe millénaire est une grande plateforme de 900m², sorte de terrasse liée à des activités cultuelles. L’organisation sociale se complexifie au cours de cette période tendant vers une organisation proto-étatique du pouvoir. Les femmes auraient joué un rôle particulier au sein de ces élites. On voit alors l’accroissement du commerce régional mais surtout international, avec notamment des produits rares et prestigieux que sont l’or, le lapis-lazuli d’Afghanistan, la cornaline de la vallée de l’Indus et les agates. Plusieurs tombes de ces élites ont été fouillées à Ulug. Alors que nombre de civilisations régionales possèdent des écritures (Elam Mésopotamie, Indus), celle de l’Oxus est agrammate et anépigraphe.
Durant l’âge du Fer (entre 1 000 à 600 avant notre ère), Ulug est le centre d’un nouveau royaume dont on ne sait encore que peu de choses. Cernée par son puissant rempart, la citadelle accueille des espaces de stockage.
L’archéologie du Turkménistan, longtemps confinée à la sphère de l’URSS
Entre Ouzbékistan, Kazakhstan, Afghanistan et Iran, le Turkménistan est couvert à 80% par le désert du Karakoum. Annexé par l'Empire russe à la fin du XIXe siècle, le pays recouvre son indépendance à la suite de l’explosion du bloc soviétique. Cette période, des années 1990, signe alors l’ouverture du Turkménistan et, par là-même, celles de nouvelles collaborations internationales, avec notamment des équipes occidentales, qui permirent ainsi de mettre au jour une archéologie et un passé, jusqu’alors strictement confinés à la sphère de l’URSS, pour mieux écrire les pages de l’histoire de l’Asie centrale.
Archéologue au CNRS, Olivier Lecomte a été, dans les années 1990, l’initiateur de l’un de ces programmes pionniers : La mission archéologique franco-turkmène. Aujourd’hui, cette mission du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères est dirigée par Julio Bendezu-Sarmiento qui a repris la fouille d’Ulug Dépé, un des plus grands sites proto-urbains d’Asie centrale.
Julio Bendezu-Sarmiento est chercheur au CNRS, spécialiste de la protohistoire de l’Iran, de l’Afghanistan et de l’Asie centrale. Il mène ses recherches au laboratoire éco-anthropologie du Musée de l’Homme (CNRS-Muséum national d’histoire naturelle).
Pour aller plus loin
- Présentation de Julio Bendezu-Sarmiento, sur Wikipédia, et sur Academia.
- Ses publications, sur HAL, le site du CNRS-MNHN-Paris Cité, sur Persée, et sur Open Edition Journals.
- A regarder, une vidéo sur la Mission archéologique française au Turkménistan (MAFTUR), présentée par Julio Bendezu-Sarmiento (2020, MNHN).
- Histoire de la Mission à Ulug Dépé (site du MNHN).
- A regarder aussi, une vidéo sur la civilisation de l'Oxus (projet OXUS récompensé par le Prix de la fondation Engie "Talents de la recherche au Musée de l'Homme" (2019).
- Page sur Ulug Dépé et sur la cité menacée de Dilberjin Tépé, dans le nord de l'Afghanistan.