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Sur les traces des agriculteurs du Néolithique au Moyen Âge à Montpellier (Hérault)
À Montpellier, une fouille de l'Inrap permet d’étudier l’évolution des pratiques agricoles et des modes de mise en valeur des terres au cours des cinq derniers millénaires : champs, chemins, vignobles, vergers, cheptel, mais aussi les caves de quelques maisons, et les sépultures de certains de ces agriculteurs.
Dirigée par l’Inrap à l’automne 2021, la fouille d’une surface d’environ 4500 m² est menée sur prescription du Service régional de l’archéologie (Drac Occitanie), à l’est du centre historique de la ville de Montpellier sur un relief de plateau en rive gauche du Lez, en préalable à la construction du Collège Port-Marianne par le Conseil départemental de l’Hérault.
Le Néolithique final
À mesure que s’étendent les surfaces étudiées par l’archéologie préventive dans et aux abords de l’agglomération montpelliéraine, apparaissent les traces d’une très forte mainmise des hommes sur ce terroir, qu’ils exploitent de manière plus intense à partir de la fin de la période néolithique.
Sur le site du collège Port-Marianne, les hommes creusent la terre pour en extraire le matériau nécessaire à la construction de leurs bâtiments, pour protéger leurs récoltes dans des silos souterrains, pour stocker leurs denrées au frais dans de petites caves. En dernier lieu, ils profitent des excavations pour enfouir leurs déchets : on y retrouve outils et vaisselle brisés, restes d'os d'animaux et parfois de végétaux, qui donnent des indications sur les aliments produits et consommés. Parfois l’une de ces fosses reçoit le corps d’un défunt et fait ainsi, opportunément, office de sépulture. Cette occupation semble pérenne et la céramique recueillie, ornée de cordons, peut être rattachée par son style à un champ chronologique couvrant les années 3700 à 3500 avant notre ère.
Cave néolithique comblée de blocs de pierre.
© Mathieu Ott, Inrap
L’Antiquité tardive
Si les cadres économiques et politiques ont été bouleversés par la fin de l’Empire romain d’Occident en 476, l’archéologie déconstruit le mythe d’un effondrement et témoigne plus de continuités que de ruptures. En Languedoc, le système domanial – la villa romaine – n’est plus le cadre dans lequel sont produites les richesses agricoles, mais les terres sont toujours mises en valeur de manière organisée.
Sous le futur collège Port-Marianne, l’occupation de l’Antiquité tardive (450 – 600), se matérialise par une cave, des fossés bordant des parcelles agricoles et plusieurs silos pour le stockage des céréales. Les champs sont limités et drainés par des fossés et des puisards entretenus régulièrement ; ils sont plantés en blé ou en vigne. La faune révèle un cheptel essentiellement composé de moutons et/ou de chèvres. Une cave, construite sur six poteaux de bois, profonde d’1 m à 1,50 m à l’origine, offrait une surface de stockage de 12 m² environ. De la maison qui la surmontait, on ignore tout : peut-être était-elle bien plus vaste et dotée de plusieurs pièces, voire d’étages.
La céramique témoigne d’un vaisselier où des pots globulaires produits sur les bords du Rhône servent à la cuisson des aliments, tandis qu’à table se mêlent des productions locales et plus lointaines. Certains plats, de belle facture, proviennent d’Afrique du Nord ; plusieurs denrées également sont importées de Tunisie, tel du vin, transporté dans des amphores qui témoignent d’un commerce méditerranéen durable jusqu’au VIIe siècle, bien au-delà de la « chute de Rome ».
Le Moyen Âge
Si peu de vestiges attestent de l’occupation de cette parcelle entre les VIIIe et XIe siècles, les témoins abondent pour la période comprise entre 1000 et 1250, et qui correspond à l’émergence de Montpellier, quelques kilomètres à l’ouest. Des fossés et des chemins creux sillonnent ce paysage de proche campagne dans une trame dense et orthogonale ; ils assainissent et desservent des petites parcelles rectangulaires dont les surfaces varient de 100 à 500 m². Certains fossés limitent d’étroits corridors, que l’on suppose voués au tri, au comptage ou à la tonte d’un cheptel souvent constitué d’ovins à cette période. Des silos, toujours creusés dans le sol, témoignent d’une agriculture également tournée vers la céréaliculture, tandis que d’autres parcelles semblent plantées en vigne. La ferme elle-même n’a pas été appréhendée ; sans doute se trouve-t-elle à proximité. Nous en trouvons les rejets, enfouis dans les fosses qui, hors d’usage, servent de dépotoirs.
Ici et là, de rares tombes sont implantées en bord de champs. Elles témoignent de funérailles « familiales », tradition qui tend alors à disparaître. Après l’an mil, la mort devient l’affaire de l’Eglise et du clergé : il convient désormais, pour le salut de son âme, d’être inhumé dans la terre consacrée du cimetière ecclésial.
Silos médiévaux, vus en coupe.
© Charlotte Gleize, Inrap
Dessin en coupe et description sur tablette de deux grands silos du Moyen Âge.
© Mathieu Ott, Inrap
Relevé de la coupe d’une fosse de stockage du Moyen Âge.
© Mathieu Ott, Inrap
Sépulture médiévale en cours d’étude par une archéo-anthropologue.
© Charlotte Gleize, Inrap
Sépulture médiévale : le corps d’un enfant a été déposé le long des jambes d’un adulte.
© Charlotte Gleize, Inrap
Aménagement : Collège Port-Marianne
Recherches archéologiques : Inrap
Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’Archéologie, Drac Occitanie
Responsable scientifique : Mathieu Ott, Inrap