Le site se trouve dans le département de la Marne, à une dizaine de kilomètres au nord de Châlons-en-Champagne, à la sortie nord du village de Saint-Hilaire-au-Temple.

Dernière modification
10 mai 2016

Le principal intérêt du site repose sur la découverte d'un habitat rural du haut Moyen Âge (VIIIe et IXe siècles), qui profite d'une mise en valeur antérieure de la vallée à l'époque gallo-romaine. Il en respecte les orientations et s'appuie sur ses vestiges. Outre l'intérêt intrinsèque de cet habitat au regard d'un corpus régional plutôt restreint, c'est la question de la continuité de l'occupation et de la mise en place des agglomérations puis des villages entre l'époque gallo-romaine et les Xe et XIe siècles qui est posée. 

L'origine

Après une occupation durant la Protohistoire, attestée par cinq silos en haut du versant, l'occupation des Ier et IIe siècles est matérialisée par dix-huit structures excavées, composées de trous de poteau, de fosses et d'un puits.
Ces vestiges gallo-romains ne semblent devoir prendre de sens qu'en relation avec un habitat repéré dans la parcelle située au nord de l'emprise des travaux.

Un habitat rural des VIIIe et IXe siècles

Après un hiatus d'au moins quatre siècles, l'habitat médiéval se met en place en reprenant les orientations gallo-romaines, en adoptant les structures typiques de l'habitat rural du haut Moyen Âge : une trentaine de fonds de cabanes et quatre ou cinq bâtiments sur poteaux et/ou sur tranchée.

L'habitat se développe de part et d'autre de la rivière, avec une occupation beaucoup plus dense sur la rive gauche. De meilleures conditions d'ensoleillement sont probablement à l'origine de cette répartition. Sur ce versant se trouvent deux bâtiments sur poteaux plantés et deux bâtiments sur tranchée à pignon en abside et poteaux. Bien qu'ils n'aient pas livré de structure interne prouvant indiscutablement leur fonction, il est tentant de les associer par deux (un sur poteaux et un sur tranchée) et de voir une unité d'habitat dans chaque ensemble.

La rive droite a été beaucoup moins densément occupée. On n'y recense qu'un fond de cabane et une sépulture isolée, les deux étant contemporains de l'occupation de l'autre rive. Il faut donc postuler un système de franchissement de la rivière qui n'a pu être mis en évidence. On peut imaginer que la rive droite pouvait servir à des activités agricoles ou de jardinage (activités par ailleurs non exclues de la rive gauche).

Néanmoins, Le Raidon ne présente pas tous les éléments typiques des structures associées à ce genre de site : on n'y rencontre aucun silo, puits, grenier, four domestique ou installation artisanale, ou toute spécificité fonctionnelle qui en faciliterait l'interprétation.

D'autre part, le site ne déroge pas au problème récurrent de l'imprécision de la datation liée à la méconnaissance de la céramique de cette époque. Si l'occupation de Saint-Hilaire est datée des VIIIe-IXe siècles, cette fourchette chronologique ne dit rien de la durée réelle de l'occupation, qui peut être comprise entre quelques décennies et deux cent cinquante ans.

L'évolution vers le village

L'église de l'actuel village de Saint-Hilaire se trouve à 600 m à vol d'oiseau en amont du Raidon. L'origine de ce bourg est au coeur du questionnement suscité par le site. Les données dont nous disposons sont en effet assez peu nombreuses et fragmentaires, mais le hiatus de quatre siècles observé dans l'occupation entre l'époque gallo-romaine et les VIIIe-IXe siècles n'exclut pas la possibilité qu'il y ait eu une installation mérovingienne à l'emplacement du site gallo-romain, hors de la zone de décapage. La discontinuité de l'occupation ne peut donc pas être absolument affirmée.

D'autre part, aucune nécropole ou lieu de culte associés à l'habitat médiéval n'ont été mis au jour et, dans le cimetière de l'église de Saint-Hilaire, un sarcophage mérovingien a été découvert.

À partir de ces données, trois hypothèses peuvent être émises.

La première hypothèse reprend le modèle établi par C. Lorren qui voit dans les agglomérations sans église et sans nécropole adjacentes des habitats intercalaires "qui se sont trouvés dépeuplés vers l'an Mil, dans le cadre d'une réorganisation sans doute autoritaire des terroirs, ou bien à l'occasion de la mise en oeuvre de pratiques culturales nouvelles". Les habitants se seraient regroupés au chef-lieu de la paroisse. La rareté des tombes isolées (on n'en compte qu'une au Raidon) prouverait que dès le VIIIe siècle, les "hommes de ces habitats enterraient leurs morts auprès de l'église voisine nouvellement construite et faisaient donc bien partie, même si l'habitat restait polynucléaire - et pour plusieurs siècles encore -, d'une réelle communauté villageoise".

La deuxième hypothèse est une variante de la première. On peut considérer Le Raidon comme un premier lieu d'implantation de l'habitat, avec peut-être une implantation à l'emplacement du site gallo-romain dès l'époque mérovingienne, puis un abandon à la fin du IXe siècle au profit du site du village actuel aux abords d'une nécropole.

La troisième hypothèse correspond à une vision colonisatrice de l'espace qui consiste à voir dans l'occupation gallo-romaine la très ancienne origine du village actuel qui, au fil des générations, aurait "glissé" le long de la Vesle jusqu'à sa stabilisation à l'endroit actuel du bourg. Cette conception réfute les idées d'abandons successifs liés à des événements politiques locaux ou d'ampleur plus vaste et semble réfutée par la découverte du site de Saint-Étienne-au-Temple, où l'habitat a été abandonné pour se déplacer sur l'autre rive de la Vesle à un moment de son histoire.

Les réponses ne pourront être apportées que par une exploration exhaustive de la rive gauche de la rivière, à partir du site gallo-romain jusque sous le village actuel.