En mars 2012, un diagnostic archéologique réalisé par l'Inrap a mis en évidence un ensemble de sépultures et de fosses de stockage de céréales (silos) au lieu-dit Lagneau.
La zone concernée par la fouille se situe à l'extérieur du bourg, en rive gauche de la Garonne, en bordure du canal latéral.

Dernière modification
10 mai 2016

La terrasse alluviale rissienne, qui se dessine dans la morphologie par un replat, a été entaillée lors du creusement du canal latéral de la Garonne. Le site se trouve près du lieu dit Saint-Martin, toponyme en lien avec un prieuré fondé en l'an 1012 par les moines de l'abbaye de Saint-Sever en Gascogne.
L'objectif des fouilles est de comprendre la chronologie des utilisations du site comme cimetière et comme zone d'ensilage.

Les vestiges les plus nombreux sont ceux d'un cimetière (environ 125 sépultures) et d'un site d'ensilage (environ 100 silos). Ils se développent de part et d'autre de deux grands murs orientés est-ouest, l'un situé à l'extrémité nord de la parcelle, le second en partie sud.

Une première occupation au Bas-Empire

Le mobilier associé au mur nord indique une occupation de la fin de l'Antiquité romaine (fin du IIIe-début du IVe siècle). Les vestiges les plus anciens sont donc ceux d'un bâtiment gallo-romain (villa ?) installé sur le rebord de pente au nord-est de la parcelle. Très arasé, car les matériaux de construction ont été en grande partie récupérés, il semble être occupé jusqu'aux IIIe-IVe siècles.

Une seconde période d'occupation médiévale, qui revêt plusieurs aspects

La seconde occupation ne se manifeste que bien plus tard (un peu avant le XIIe siècle) Elle est représentée par des silos à grains et des sépultures en pleine terre, qui se développent parallèlement, de part et d'autre des vestiges des deux murs nord et sud.
Le cimetière s'agrandit en même temps que l'aire de stockage se déplace légèrement, car certaines sépultures recoupent des silos abandonnés.
L'occupation du site en zone d'ensilage perdure vraisemblablement pendant quelques décennies puisque des silos viennent à leur tour s'installer sur des sépultures.

Les sépultures

123 sépultures ont été entièrement fouillées, dont la majeure partie ne présente ni trace de cercueil ni mobilier. Celles situées en partie sud du site sont creusées en pleine terre dans des fosses larges et profondes alors que celles en partie nord du site sont enterrées très peu profondément. Plusieurs orientations ont été observées, montrant sans doute plusieurs phases ou regroupements familiaux. Une datation radiocarbone faite sur un des squelettes de la partie sud du cimetière (Conventional radiocarbon age: 860±30 BP) donne un âge calibré Cal AD 1160 à 1220). Ceci place une phase d'occupation du cimetière paroissial vers la fin du XIIe siècle. Pour le moment on ignore si les autres sépultures illustrant des orientations et des pratiques funéraires différentes sont de la même période chronologique. Les études archéo-anthropologiques menées actuellement permettront de caractériser la population inhumée à partir des données biologiques, de cerner l'évolution des pratiques funéraires et de proposer un phasage chronologique des sépultures.

Les fosses et silos

99 silos avérés ont été fouillés, auxquels s'ajoutent 55 fosses mal caractérisées. Certaines contenaient des scories et des fragments de terre rubéfiée, indices d'une occupation ponctuelle du site comme atelier métallurgique ou forge.
Bien que les silos présentent des profils variés, la majeure partie est de type « en bouteille ». Les analyses carpologiques menées actuellement sur les graines et noyaux présents dans les silos permettront de déterminer quels grains ont été stockés et pour quelle population.
Deux aménagements de type grenier sur poteaux ont pu être mis en évidence : un grenier carré à 4 poteaux et une structure rectangulaire à 6 poteaux, malheureusement dépourvus de mobilier.

Le mobilier

La céramique semble homogène et contemporaine. D'un point de vue typologique, elle s'apparente au vaisselier régional du Bergeracois, d'Aquitaine ou de Midi-Pyrénées. De grandes jattes modelées, des oules et des pégaus  côtoient des cruches à bec disproportionné. Les décors sont rares et frustres. L'étude céramologique sommaire permet de proposer une période d'occupation du site comprise entre la seconde moitié du XIIe et la fin du XIIIe siècle. Quelques objets métalliques liés au travail agricole ont été trouvés, ainsi que des fragments de meule.

Recherches documentaires et perspectives

Les recherches documentaires vont nous orienter sur la mise en place, le fonctionnement et la durée de vie de ce cimetière paroissial et de cette aire d'ensilage rattachés au prieuré Saint-Martin. Les premières recherches entreprises permettent en effet de rattacher de manière indiscutable ce terroir de Buzet au prieuré Saint-Martin fondé par l'abbaye de Saint-Sever en l'an 1012. Il nous est sans doute permis d'observer sur le terrain que ces terres, avant de devenir un cimetière paroissial servaient déjà de zone d'ensilage ; est-ce le reflet d'une politique mise en place par l'abbaye de Saint-Sever pour développer son temporel ? Il se pourrait qu'il s'agisse ici très concrètement de l'établissement d'un prieuré à la période charnière du début du XIIe siècle par l'abbaye mère afin que les terres qu'elle possède déjà prennent le statut de paroisse.