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Des sanctuaires et des dieux à Pétra
Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.
Avec Laurent Tholbecq, archéologue, professeur à l’Université libre de Bruxelles, titulaire de la Chaire d’Archéologie des provinces romaines, directeur de la Mission archéologique française de Pétra.
Le site de Pétra, en Jordanie, abrite les vestiges de la capitale du royaume nabatéen. La mission archéologique française de Pétra y fouille depuis une vingtaine d'années. Son directeur, Laurent Tholbecq, évoque les fouilles des lieux de culte de ce site fabuleux.
La richesse de Pétra provient de son rôle dans le transport de produits à forte plus-value tels que l’encens, la myrrhe et les aromates, depuis les royaumes de l’Arabie Heureuse (l’actuel Yémen et le sud du Sultanat d’Oman) vers les marchés gréco-romains via Gaza et plusieurs ports de Méditerranée (Délos, Pouzzoles). Le territoire de la Nabatène couvre le territoire du Sud de l’actuelle Syrie, la Jordanie, la région du Hedjaz, au nord-ouest de l’Arabie Saoudite, le Néguev et, probablement, le Sinaï.
Le secteur étudié par l'équipe de la mission archéologique française de Pétra
- © Laurent Tholbecq / MAFP
Le temple de Qasr al-Bint
© Laurent Tholbecq / MAFP
Ses premiers vestiges remontent aux IVe-IIIe siècles av. J.-C., alors que le royaume est annexé par l’empereur Trajan qui en fait alors une nouvelle province romaine, celle d’Arabie. La ville de Pétra s’est remarquablement développée autour des monuments emblématiques de la royauté hellénistique que sont le mausolée, le palais et le temple, avant de se doter de l’appareil urbanistique et monumental des villes romaines et byzantines d’Orient.
Depuis 1999, la mission archéologique française à Pétra poursuit l'étude des sanctuaires païens de ce gigantesque site et de ses environs. Le cœur de ces recherches porte sur le « Qasr al-Bint », temple situé dans l’hypercentre de l’ancienne capitale. Comme représentation symbolique du pouvoir, ce lieu de culte vraisemblablement dynastique est topographiquement rattaché à l’espace palatial et reconfiguré radicalement par les autorités romaines au moment de l’annexion du royaume nabatéen. Avec ses absides, le monument impérial abrite alors les représentations colossales de Marc Aurèle et de Lucius Verus.
Fouille dans le monument à abside (IIè siècle).
- © Laurent Tholbecq / MAFP
Travail sur des enduits peints dans le secteur palatial
- © Laurent Tholbecq / MAFP
Les lieux de culte sont d’une grande variété à Pétra, ainsi, quantité de petits sanctuaires périphériques existent dans les massifs montagneux, des sanctuaires en lien étroit avec les nombreuses tribus composant la population de la cité. Ainsi, l’équipe d’archéologues a fouillé la « Chapelle d’Obodas », lieu de réunion familial dans laquelle une statue du roi divinisé fut exhumée, et qui fut fréquentée par au moins cinq générations d’habitants avant l’annexion de Rome.
En parallèle, un espace religieux, perché sur l’une des montagnes dominant le centre-ville, a été mis au jour (le Jabal Numayr), mais aussi un hameau périphérique, situé sur un sommet associant espaces religieux, domestiques et balnéaires (le Jabal Khubthah). Tout récemment, les recherches ont porté sur un sanctuaire périurbain lié au commerce caravanier et à l’encens, sanctuaire abritant deux temples, des thermes, un théâtre et un caravansérail (Khirbet Sabra).
Vestiges des bains du Jabal Khubthah
- © Laurent Tholbecq / MAFP
Site de Wadi Sabra - un caravansérail
- © Laurent Tholbecq / MAFP
Fort de ces découvertes, les archéologues ont pour objectifs d’identifier en quoi la variété et la distribution spatiale des lieux de culte reflètent la structuration de la société nabatéenne.
Le projet, conduit par Laurent Tholbecq, vient d’être récompensé, en 2022, par le Prix de La Fondation Simone et Cino Del Duca, de l’Institut de France.
Équipe Inrap sur le chantier de fouilles en octobre 2017
- © Laurent Tholbecq / MAFP
Pour aller plus loin
- Pages de Laurent Tholbecq : sur le site de l'ArScAn (Archéologies et Sciences de l’Antiquité), sur le site de l'ArScAn/Apohr (Archéologie du Proche-Orient Hellenistique et Romain), ses publications sur le site Academia/Université Libre de Bruxelles.
- A visionner, une vidéo de Laurent Tholbecq qui explique son travail, en tant que directeur de la mission archéologique française à Petra (Jordanie), suite à l'obtention du Grand prix d'archéologie de la Fondation Simone et Cino del Duca en 2022, dans le cadre des Grands Prix décernés par les Fondations de l'Institut de France (Chaîne You tube de l'Institut de France).
- Article sur le Grand Prix d'Archéologie sur le site du CNRS.
- Page de la mission archéologique française de Pétra (site de l'ArScAn), et rapport des campagnes archéologiques de l'année 2021 (site Academia).
- Page sur Pétra (site de l'Unesco).
Habitat héllenistique et romain
- © Laurent Tholbecq / MAFP