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6, rue des Fuseliers, rue Chanzy, rue Rockefeller

A Reims, Marne, la fouille, réalisée sur 1700 m², a permis d'enrichir considérablement nos connaissances sur le centre de la ville depuis la fin de l'époque gauloise jusqu'à nos jours.

Chronique de site

6, rue des Fuseliers, rue Chanzy, rue Rockefeller à Reims (Marne)

Date de publication

20 novembre 2008

Dernière modification

10 mai 2016

Les contextes historiques et archéologiques, l'épaisseur stratigraphique, de l'ordre de 5 m en moyenne, et l'état de conservation exceptionnel ont constitué des conditions particulièrement favorables. Plus de 300 monnaies, réparties sur une longue période, ont été recueillies dans les différents niveaux d'une occupation dense et continue. C'est aussi à travers l'histoire des transformations structurelles ou architecturales de ce quartier qu'il a été possible de retracer celle des habitants.

6, rue des Fuseliers, rue Chanzy, rue Rockefeller

Niveaux de l'Antiquité tardive et du Moyen Âge en cours d'étude.
En arrière plan, la cathédrale de Reims.

Vue d'ensemble du chantier, prise depuis la cathédrale.

Vue d'ensemble des constructions gallo-romaines, dont le bâtiment commercial et artisanal du III^e siècle et le rempart du IV^e siècle.

Négatifs de canalisations en bois du III^e siècle encastrées dans une chaussée.
Elles étaient évidées, cerclées par des frettes (anneaux) en fer et recouvertes d'une couche de sable.
Ces tuyaux indiquent que le secteur était desservi par un réseau d'eau sous pression.

Hypothèse de restitution du dernier état du bâtiment commercial construit en bordure de la rue.
Y figurent les canalisations en bois encastrées dans la chaussée.

Hypothèse de restitution de l'enceinte tardive.

Démontage de la fondation du rempart de l'Antiquité tardive.

Mur d'escarpe construit au XI^e siècle.
Il s'agit d'un élément des fortifications médiévales.

Cruche en céramique sigillée de la fin du III^e siècle.

Cadenas gallo-romain en fer.
Associé à de nombreuses clefs et verrous, ce mobilier témoigne de la fermeture du bâtiment commercial.

Déchets de tabletterie du III^e siècle.
L'artisanat de l'os a généré une grande quantité de chutes : plus de 10 kg ont été recueillis devant l'atelier.

Étiquette gallo-romaine en os.

Pièce d'orfèvrerie représentant un léopard et un cheval qui s'affrontent.
Le cheval a les yeux plaqués d'argent et la blessure est une feuille de cuivre. Les yeux et le collier du léopard, de même que les taches de son pelage, figurées sous forme de pastilles, sont en cuivre.
Le socle est orné de palmettes en argent ; des restes d'argent apparaissent également sur les frises.

Statue d'Ève utilisée en réemploi dans une cave du XIX^e siècle, qui appartenait au socle de la Vierge sur le portail central de la cathédrale.
Il est probable que le socle fut martelé à la Révolution, mais il n'est pas exclu qu'il ait pu être victime de la pudibonderie des chanoines à la fin du XVIII^e siècle.

Angle d'un bâtiment mérovingien

Plan d'ensemble du site pendant l'Antiquité.

L'occupation de La Tène finale jusqu'à la première partie du règne d'Auguste

La première occupation, représentée par des constructions en matériaux légers et des silos de stockage de céréales, témoigne d'une activité agricole. Dans la première partie du règne d'Auguste, un artisan meunier a occupé les lieux ; les restes de son atelier, meules et grains prêts à être moulus, ont été répandus sur le sol après un incendie. Il faut noter que ces vestiges sont antérieurs à l'implantation d'une rue, et que cette relation stratigraphique fournit d'intéressantes données sur la chronologique de l'urbanisation primitive.

La rue du Haut-Empire et les constructions riveraines

Les progrès urbanistiques antiques sont illustrés par l'évolution de la voirie et des secteurs bâtis, depuis le tournant de notre ère jusqu'au début du IV^e siècle. Ainsi, dans la seconde partie du règne d'Auguste, un grand entrepôt de type horreum (réservé au stockage des céréales) est construit en pierre, parallèlement à la rue. Dans la première moitié du II^e siècle, ce bâtiment est modifié pour devenir un grand ensemble à vocation artisanale ou commerciale, ouvert sur la rue. De nouveaux murs de refends sont construits, en briques crues et bois. Ils sont alors tous dotés de piliers, qui répondent à ceux d'un portique installé simultanément sur la rue. Les données de fouille, confortées par les hypothèses architecturales, valident l'idée d'un étage au-dessus du portique, qui, selon toute vraisemblance, abritait les habitations des artisans/marchands. La dernière modification se traduit par la fermeture du bâtiment, dont témoignent les traces au sol d'une sablière basse, ainsi que de nombreux cadenas, pentures, ferrures et gonds de portes. Les transformations successives de cet ancien entrepôt reflètent le dynamisme économique du quartier, illustré entre autres par une activité artisanale de tabletterie.
La fouille a aussi dégagé un dispositif de gestion des eaux usées et pluviales. Mis en place dès le troisième quart du I^er siècle, il atteindra son apogée avec la création d'un réseau de canalisations d'adduction sous pression installé au III^e siècle.

De l'enceinte tardive aux fortifications carolingiennes

À la fin du premier tiers du IV^e siècle, le quartier est démantelé pour permettre la construction de l'enceinte de la ville tardive (la découverte de monnaies constantiniennes a fortement contribué à préciser sa datation). Lors des fouilles de 1998 et 2000, elle a été étudiée depuis ses fossés extérieurs jusqu'aux bâtiments alignés sur la rue périphérique intérieure. Composée d'une courtine et précédée d'un fossé, elle a livré les vestiges d'une tour inconnue jusqu'alors. Un bâtiment daté du début du VI^e siècle, et dont la vocation reste difficile à définir, semble pouvoir être mis en relation avec le groupe épiscopal qui se développe à la même époque plus à l'est. Les occupations des VI^e au IX^e siècles ont fourni une faible quantité de données, hormis plusieurs inhumations d'immatures et de périnataux, datées des VII^e-VIII^e siècles et découvertes au pied du rempart, dans un contexte mal défini.
À la fin du IX^e siècle, une nouvelle fortification est élevée à l'emplacement de l'enceinte romaine alors démantelée. Elle est constituée d'une courtine en moellons et d'un double fossé, renforcé plus tard par des murs d'escarpe et de contrescarpe. Une porte fortifiée complète ce système défensif.
La richesse du mobilier archéologique recueilli dans les latrines et les fosses dépotoirs est significative d'une occupation seigneuriale, aristocratique ou ecclésiastique.

Le quartier médiéval

Au XII^e siècle, des constructions colonisent l'emprise des fortifications carolingiennes abandonnées.
Les latrines utilisées aux XII^e et XIII^e siècles ont concentré un nombre important de rejets de cuisine et de reliefs de repas riches en paléosemences et en restes de poissons, dont l'abondance et la grande variété témoignent, comme pour l'époque carolingienne, du statut privilégié des consommateurs.
En revanche, le contenu des latrines du XIV^e siècle indique un changement des habitudes alimentaires, démontrant l'abandon du quartier par les classes les plus aisées.