Escabèche, merguez, rousquilles et autres recettes : des plaisirs de bouche partagés

La question des emprunts culinaires entre le monde arabo-musulman et l'Europe latinochrétienne est complexe. Des recettes se sont certes transmises, mais souvent sous une appellation différente. D'autres fois, seuls les appellations ont été importées, car les préparations qu'elles désignent à l'arrivée n'ont plus grand chose à voir avec ce qu'elles servaient à nommer au départ. Il arrive que les emprunts soient si intriqués qu'il est impossible de décider quelle est l'origine exacte du plat ou du mot. En outre, il existe un fond culinaire commun aux sociétés du bassin Méditerranéen, lié aux produits de base disponibles (blé, huile d'olive, graisse et beurre, viande ovine, etc.), de sorte qu'il est là encore parfois difficile de distinguer ce qui constitue véritablement un transfert et ce qui relève d'un simple phénomène de convergence.
Nous essaierons d'y voir plus clair en nous intéressant à certains types de préparation, comme la cuisson au vinaigre, à certains assemblages d'ingrédients et à certaines recettes bien attestées dans l'Occident musulman médiéval. Le corpus documentaire étudié comprend des manuels de ?isba et des livres de cuisine, notamment la Fa??lat al-?iw?n d'Ibn Raz?n al-Tu??b? (Andalus, XIII^e siècle), le Kit?b al-?ab?? almohade (XIII^e siècle), le Libre del coch de maître Robert (XIV^e siècle) et le Viandier de Taillevent (XIV^e siècle).