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Comment l’archéologie préventive renouvelle-t-elle la perception du Paléolithique dans le Nord de la France ?
Table ronde qui s'est tenue à la Maison Archéologie & Ethnologie, René-Ginouvès (Nanterre), les 15 et 16 octobre 2018. Manifestation organisée par F. Blaser, C. Chaussé, H. Djema et J.-L. Locht, avec le soutien de l'Inrap, de la DRAC Île-de-France et du CNRS (UMR 7041 et UMR 8591).
Table ronde : "De l’Ile-de-France à l’Europe du Nord-Ouest : les peuplements humains avant le dernier maximum glaciaire, bilan, objectifs et perspectives de la recherche", par Jean Luc Locht, David Hérisson, Émilie Goval et Clément Paris
Auteurs
- Jean-Luc Locht, Inrap Hauts-de-France, CNRS - UMR 8591 Laboratoire de Géographie Physique
- David Hérisson, CNRS - UMR 7041 ArScAn, Équipe Antet
- Émilie Goval, DRAC Hauts-de-France - Service Régional de l’Archéologie, CNRS - UMR 7194 Histoire naturelle de l’Homme préhistorique (MNHN- CNRS-UPVD)
- Clément Paris, Inrap Hauts-de-France, CNRS - UMR 7041 ArScAn, Équipe Ethnologie préhistorique
Résumé
À la suite des interventions ponctuelles sur les sites de Biache-Saint-Vaast et de Seclin dans les années 70, la fouille de Riencourt-les-Bapaume a marqué un tournant méthodologique décisif pour la Préhistoire dans le Nord de la France. Désormais, depuis près de trente ans, des sondages systématiques sont effectués par des équipes spécialisées pour la détection de sites paléolithiques à l’aval des projets d’aménagement et de construction. La construction régulière de grands tracés linéaires (A16, A29…) a permis l’accumulation de très nombreuses données par la multiplication des points d’observation dans la région. Un cadre chronostratigraphique des occupations humaines paléolithiques a ainsi pu être établi et atteint désormais un niveau de résolution sans égal au niveau européen. Cette finesse permet de mettre en évidence la variabilité des industries lithiques sur le temps long selon les phases chronoclimatiques, et in fine d’identifier des groupes culturels distincts et cohérents.
En contexte de tracés linéaires (i.e. autoroute, voie ferrée, canal), les découvertes sont le plus souvent suivies de fouilles systématiques. Ces grands décapages ont permis d’appréhender le fonctionnement interne des gisements, notamment par l’étude dynamique des remontages, mais également au-delà du simple locus, à l’échelle de paysage véritablement grâce aux dimensions colossales des surfaces décapées. En fonction des récurrences comportementales observées sur plusieurs sites subcontemporains, des hypothèses de restitution des territoires ont aussi pu être tentées. Bien que très riche d’information, les tracés linéaires ont pour défaut de densifier les connaissances selon les limites de l’aménagement et de ne pas offrir l’opportunité de sortir des limites, même si la logique d’exploration scientifique inviterait à la faire afin de mieux appréhender les dynamiques sédimentaires et les extensions des occupations humaines à la pleine échelle du paysage.
À côté de ces grands tracés linaires qui demeurent exceptionnels (dans le temps et vus les moyens alloués), les opérations quotidiennes sont souvent de faible ampleur et se limitent à des diagnostics parfois approfondis. Les découvertes doivent ainsi être traitées de façon beaucoup plus rapide et sont très (trop) rarement suivies d’une fouille, mais elles s’inscrivent pleinement dans les programmes de recherche en cours. Elles permettent indéniablement de compléter les connaissances des occupations paléolithiques de façon complémentaire aux opérations menées sur les grands tracés et en programmée, notamment dans des secteurs clé que sont les zones urbaines.