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Mis à jour le
13 mars 2023
Collection
Carbone 14

Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.

Avec André Delpuech, archéologue, anthropologue, chercheur à l'EHESS (centre Alexandre Koyré), conservateur général du patrimoine, ancien directeur du Musée de l'Homme et responsable des collections des Amériques au musée du quai Branly - Jacques Chirac.

Il y a mille et une manières de faire de l’archéologie, fouiller dans les musées en est une, qui permet de non seulement retrouver des pièces patrimoniales, mais aussi leur histoire et par là même de contribuer à leur traçabilité.

Mettre en lumière la biographie et l’histoire souvent complexe de ces biens conservés dans nos musées, telle est la tâche à laquelle s’est attelé l’invité du magazine de l’archéologie de France Culture. Archéologue américaniste, André Delpuech s’est ainsi récemment penché sur des objets issus d’Amazonie et du Mississippi.

Un singe en Amazonie ?

Désormais conservée au musée du Quai Branly, sous le numéro d’inventaire 71.1887.160.1, une grande statue de pierre fut rapportée d’Amazonie, en 1847, par Francis de La Porte, dit « le comte de Castelnau » (1802-1880), à la tête de la première grande expédition scientifique française en Amérique du Sud. C’est au cœur de l’Amazonie que Castelnau obtient la statue, dans le hameau de São José de Barra, sur la rive septentrionale du rio Negro, à l’emplacement de la future ville actuelle de Manaus. Rapportée en France, cette sculpture représentant un possible « singe accroupi » est présentée au Louvre. Le Brésil évoque alors un pillage, une spoliation. C’est dans ce contexte qu'apparaît, au Brésil, une pièce de théâtre intitulée « La statue amazonienne », pamphlet, allégorie satirique sur la France et ses scientifiques, aussi ignares que mal intentionnés… Cette mauvaise publicité fera naître des doutes sur son authenticité : le singe accroupi serait-il un faux ?

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Dessin de la statue amazonienne par le Comte de Castenau / La même statue en pierre exposée au musée du Quai Branly-Jacques Chirac 



 

- © Comte de Castelnau / André Delpuech

Découverte d’un objet sacré du Mississippi

Au cœur des réserves du Musée d'art et d'archéologie du Pays de Laon, la recherche d’objets archéologiques collectés anciennement dans le Saint-Domingue français, est l’occasion de mettre au jour d’un lot de dessins figurant des objets appartenant à une tout autre culture : celle des Natchez de la basse vallée du Mississippi. Les manuscrits sont datés de 1735 et proviennent d’un ancien cabinet de curiosités. Ils représentent des pipes à l'effigie de félins provenant d'un temple Natchez, pillé lors d’un affrontement entre français de Louisiane et amérindiens.

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Reproductions d'une pipe Natchez, conservées au musée de Laon 



 

- © Musée de Laon

Six mois après les trouvailles du musée de Laon, André Delpuech découvre qu’une des pipes cérémonielles Natchez est conservée dans les collections d’Amériques du Musée du quai Branly - Jacques Chirac à Paris. Celle-ci a été offerte, en 1950, par Charles Ratton (1895-1986), célèbre marchand parisien d’art tribal, au Musée de l’Homme. L'examen de l'objet confirme alors la reproduction conservée à Laon.

Cette pipe possède un lien direct avec la religion, puisqu’elle était utilisée en hommage au « soleil »… Elle provient d’un grand temple, situé au Grand Village des Natchez, et désormais fouillé par les archéologues. À l’intérieur du temple, figurait un feu sacré qui n'était pas autorisé à s'éteindre, et les ossements d’ancêtres aristocrates. Seuls les prêtres et les principaux chefs le fréquentaient. Désormais, les collections publiques françaises possèdent un rare objet de culture Natchez, dont l’histoire peut être retracée.

Aujourd’hui, l’histoire et la biographie de quantité d’objets ethnographiques et archéologiques, issus de lointains voyages et conservés dans nos musées, restent à écrire...

Pour aller plus loin

  • Pages d'André Delpuech : sur le site du Centre Alexandre-Koyré (EHESS/CNRS/MNHN), sur wikipedia, sur le réseau Linkedin, sur le site Babelio.
  • Page de présentation de son ouvrage, co-rédigé avec Jean-Paul Jacob, Archéologie de l'esclavage colonial, réédition aux éditions de la Découverte, 2020 (site de l'éditeur).
  • A visionner, un entretien avec André Delpuech sur le métier de Conservateur du patrimoine (Chaîne You tube de l'Université Paris I Panthéon-Sorbonne).
  • A visionner aussi, une vidéo sur Le Déclic d'André Delpuech qui l'a mené à s'intéresser à l'histoire du continent américain et à la création d'un centre d'archéologie en Guadeloupe.
Année :
2023
Durée :
29 min