À Saint-Sauveur, l’Inrap a fouillé une occupation couvrant les époques gauloise et romaine. Il comprend notamment une nécropole et un habitat gaulois dont les archéologues ont pu suivre l’évolution vers un habitat romain aisé. Cette fouille qui a livré un important trésor monétaire complète celle de 2015 qui avait également révélé plusieurs structures un riche mobilier.

Dernière modification
05 janvier 2022

Des nécropoles gauloises hiérarchisées

Une nécropole gauloise composée de cinquante-trois tombes avait déjà été découverte par l’Inrap en 2015. Le cimetière a perduré près de 150 ans, au cours des IIIe et IIe siècle avant notre ère. Des vases accompagnent chaque défunt dans sa tombe, avec souvent des offrandes alimentaires et parfois des dépôts d’objets métalliques : paires de forces, couteaux, ciseaux, rasoirs, et quelques éléments de parure comme des bracelets ou des perles.

Dépôt de mobilier dans un trou de poteau (fouille 2021).

Dépôt de mobilier dans un trou de poteau (fouille 2021).

© Inrap


Une tombe a fourni des appliques de joug qui appartenaient à un attelage. La fouille de 2021 a révélé une autre nécropole de la même période, installée à plusieurs centaines de mètres, en bordure du site d’habitat. Elle est circonscrite par un enclos ouvert vers l’est. Trois tombes occupent l’espace central, dont l’une plus richement dotée qui renferme cinq vases et deux perles en verre de couleur bleue.

Perles de verre bleu déposées en offrande dans une tombe à incinération de La Tène C2-D1.
Perles de verre bleu déposées en offrande dans une tombe à incinération de La Tène C2-D1 (fouille 2021)

© Inrap

L’habitat gaulois (Ier siècle avant notre ère)

Situé à proximité d’une des nécropoles, l’habitat du peuple ambien leur est contemporain. Il est délimité par un fossé d’enclos ouvert vers l’est et le nord, tandis que la partie centrale est occupée par des greniers surélevés sur poteaux, des fosses dépotoirs et quelques silos. Les restes osseux animaux retrouvés attestent l’aisance des habitants qui privilégiaient une alimentation en viandes de qualité, fraîches et recherchées (agneau, porcelet, chiot). Leur statut à part est confirmé par la découverte rare d’un os frontal humain portant des traces de découpe, signe d’un geste rituel. L’occupation perdure jusqu’au début de la période romaine sans aucune transformation dans l’organisation du site.

Un habitat groupé d’époque romaine

Plus au nord, un autre point d’habitat gaulois plus modeste, abandonné durant quelques décennies est réinvesti dès le milieu du Ier siècle de notre ère. À l’ouest, un espace clôturé semble tourné vers une fonction agropastorale. Les vestiges découverts donnent l’image d’une population romanisée très tôt, ayant des contacts commerciaux lointains, mais restant fortement ancrée dans les habitudes alimentaires gauloises comme l’hippophagie.

À partir du milieu du IIe siècle, le site est réorganisé, avec une extension de l’habitat et l’apparition d’activités artisanales. De vastes bâtiments d’habitation, associés à des caves et à des celliers s’organisent autour d’une cour dominée par une construction imposante pourvue d’une cave. Dans les fondations de ce bâtiment rectangulaire, un vase enterré renfermait un dépôt monétaire.

Le trésor monétaire découvert en avril 2021 le long d’un chemin se présente dans un vase en bronze de 6,8 kg. Le col était obstrué par du tissu (en cours d’étude).

Le trésor monétaire découvert en avril 2021 le long d’un chemin se présente dans un vase en bronze de 6,8 kg. Le col était obstrué par du tissu (en cours d’étude). 

© Stéphane Lancelot, Inrap


La position de la construction principale et le cheminement pour y accéder, de même que la partition entre une cour avec des activités et une zone résidentielle rappellent l’organisation en pars urbana et pars rustica des exploitations agricoles gallo-romaines. À cette période est aussi installée une forge servant à façonner, à partir de petits lingots, des objets de petites dimensions comme des clous ou des petits couteaux.

Les restes de faune montrent une consommation carnée variée composée majoritairement de porc et de moutons. La qualité et la quantité remarquables de mobilier piégé dans les structures excavées illustrent le statut aisé des occupants (choix des morceaux de viande, céramiques importées, vaisselle métallique, parures, écriture...) et témoignent des activités qui y sont pratiquées (métallurgie, agriculture, meunerie, travail du textile, du bois, du cuir).

Au cours du IIIe siècle, un incendie ravage une partie du site et marque sa condamnation avant son abandon à la fin du IIIe siècle ou au début du siècle suivant.

La découverte en 2021 d’un trésor monétaire conservé dans une bouteille en tôle de bronze est le témoin de l’abandon de cette occupation.

 perle en ambre issue d'une sépulture,exceptionnelle par ses dimensions (3,8 cm de diamètre), fouille de 2015.

À gauche, applique de harnais ajourée de type « Trompeten muster » représentant des dauphins affrontés (IIIe s s ap. J.-C.). À droite, rondelle dentée retrouvée dans un vase avec trois fibules et interprétée comme applique vestimentaire. En dessous : perle en ambre issue d'une sépulture,exceptionnelle par ses dimensions (3,8 cm de diamètre), fouille de 2015.

© Stéphane Lancelot, Inrap

Aménagement : Communauté de communes Nièvre et Somme
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Hauts-de-France)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Lydie Blondiau, Inrap