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Archéologie des villae gallo-romaines en Hauts-de-France : où en est-on en 2024 ?
Entrée libre. Lien Zoom (ID de réunion : 971 4295 2007 / Code secret : 382011)
Journée d’étude organisée par l’Inrap et l’UMR Halma.
Villa… Ce terme si souvent employé dans la littérature archéologique des Hauts-de-France renvoie à des établissements ruraux aux caractéristiques bien définies. Les différentes campagnes de survol de R. Agache dans les années 1960-1970 montrent des exploitations agricoles aux plans souvent très homogènes. Tout en longueur, elles sont divisées en deux par un mur de clôture séparant une partie résidentielle (pars urbana) d’une partie agricole (pars rustica). Cette dernière se caractérise par une grande cour rectangulaire ou trapézoïdale, délimitée par un mur de clôture, et autour de laquelle se répartissent des édifices tandis que le bâtiment principal se place au fond et dans l’axe de la cour. Ce modèle, très fréquemment reconnu en Picardie et partout en France, n’est pourtant pas un modèle unique.
Le colloque AGER de 1993 a permis, en son temps, de rompre avec l’idée que la villa est une innovation typiquement romaine et a révélé la continuité d’occupation du sol. Les grandes exploitations laténiennes à plan axial séparant demeure et partie agricole proprement dite ont pu, dès lors, être considérées comme étant à l’origine de la villa romaine.
Les publications de M. Redde de 2014 et de 2017 insistent quant à elles sur plusieurs points :
- L’émergence des premières villae adoptant des formes et des modes de construction romaines ne se produit guère avant, au plus tôt et à quelques exceptions près, le milieu du Ier siècle de notre ère, voire plus tardivement.
- Les “Grandes villae à pavillons multiples alignés” ne constituent pas l’exemple le plus courant : Cette architecture pourrait correspondre à des productions spécifiques. Elles ne sont pas, en tous cas, le domaine de grands entrepreneurs agricoles ou d’une vieille aristocratie foncière.
- L’incontestable transformation progressive de l’habitat rural vers une architecture luxueuse “à la romaine”, dans le courant du IIe siècle et au début du IIIe ne doit pas non plus occulter la persistance d’un habitat plus modeste, qui n’est pas nécessairement incompatible avec une productivité agro-pastorale réelle.
Par ailleurs, il souligne, en 2017 également, que l’emploi du mot villa par les historiens et archéologues contemporains implique un jugement de valeur, en contradiction avec les agronomes latins qui l’utilisent indifféremment pour désigner aussi bien une “ferme” qu’une grande résidence de campagne.
Les multiples domaines agricoles fouillés ces dernières années en Haut-de-France mettent ainsi en lumière un monde complexe et contrasté où cohabitent propriétaires et tenanciers, petits ou grands, et des modes d’exploitation très différents, parfois au sein d’un même ensemble foncier. Les petites « fermes », aux ager parfois imbriqués et pouvant entretenir des liens de dépendance, sont autant de témoins d’une occupation dense du terroir.
Dès lors, se pose la question de l’approche scientifique, technique et intellectuelle du fait villa par l’archéologie préventive et les historiens.
Il a été démontré que les évolutions architecturales observées sur les différents sites fouillés en Haut-de-France sont variées et pas toujours concomitantes. Cette journée d’étude, qui s’inscrit dans le cadre des ateliers de l'Halma (thème 1 culture, espace et territoire), sera donc une bonne occasion de faire le point sur cette thématique au travers de plusieurs exemples présentant des modèles différents de celui de la « villa picarde » le plus souvent mis en exergue.
Son but est d’inviter les chercheurs à s’interroger sur le phénomène de la villa, sur son évolution de la transition à son déclin au tournant du Ve siècle en Haut-de-France et sur son intégration au sein d’un vaste terroir. En effet, les nombreuses découvertes ces dix dernières années dans la région Haut-de-France renouvellent les données et permettent de nouvelles perspectives.
Le dernier bilan proposé remonte à 2009 : Y-a-t-il une villa gallo-romaine dans le Nord-Pas-de-Calais en hommage à Pascal Quérel. La journée d’étude mettait l’accent sur les caractéristiques des villae au travers des exemples les plus récent mis au jour (Ruits « Les Meurets », Bailleul « ZAC des collines » et Mérignies « Domaine du Golf de la pévèle », Brebière « rue Désobry », mais aussi Hordain et Cuincy (vallée de la Scarpe). Aucune publication n’a finalisé cette journée.
Depuis, aucune synthèse ni bilan autour des villae n'a été réalisé dans la région. Nous souhaitons donc faire de cette journée un nouveau point d'étape de l'avancement de la recherche sur un sujet fertile, qu'une actualité riche vient régulièrement abonder en données neuves. À l'image de la journée de 2009, des fouilles récentes seront présentées, sur une aire étendue de l'ancienne région Picardie à la frontière culturelle avec la Belgique. Les questions de typologie et de définition du fait villa, sans cesse renouvelées, demeureront un enjeu central des discussions. Il s'agit de poursuivre le travail fondamental de distinction entre stéréotypes et particularismes locaux, engagé voilà près de 60 ans par Roger Agache et d'établir un nouveau jalon dans la compréhension de ce phénomène si emblématique de la ruralité gallo-romaine en Hauts-de-France qu'est la villa.